vendredi 3 juin 2016

Bouche cousue, de Marion Muller-Colard

Editeur : Gallimard jeunesse (Scripto)
Année : 2016
Pagination : 98 p.
Public visé : Adolescents, à partir de 15 ans

Résumé :
Lors d'un déjeuner dominical avec sa famille, Amande, trentenaire et célibataire, constate que l'atmosphère est encore plus tendue et glaçante que d'habitude. Soudain, la révélation tombe : son neveu de 15 ans, Tom, le seul des siens dont elle se sente proche, a embrassé un garçon. Ses parents sont horrifiés et son grand-père le gifle. Amande décide alors d'écrire, pour Tom autant que pour elle, un épisode déterminant de sa propre adolescence.
Car c'est sa propre histoire qui se répète à travers cette gifle : lorsqu'à 15 ans, dans les années 90, elle-même est tombée amoureuse d'une fille...

Ce que j’en pense :
Voilà un petit roman qui a tout d’un grand car il aborde beaucoup de thèmes importants : la famille, l’intégration, le corps, l’homosexualité…
Avec délicatesse, l’auteure nous raconte un moment de bascule où son héroïne, adolescente, réalise qu’elle est attirée par les filles. Le choix de ce moment charnière explique que le roman soit si court : nous ne saurons presque rien du futur de cette jeune fille, l’histoire est concentrée sur quelques mois, ce qui peut être un peu frustrant !
Mais cet événement est raconté avec délicatesse et sobriété, dans un style que j’ai beaucoup apprécié, une belle écriture qui reste accessible. J’ai particulièrement apprécié la manière dont est utilisée la laverie des parents d’Amandana, dans un parallèle avec le corps et l’esprit, et tout le passage concernant l’opéra.
J’ai été en revanche un peu moins convaincue par la mise en abyme avec le neveu d’Amande, un peu surfaite et peu utile selon moi.

Les + : l’écriture, la place de la laverie dans l’histoire
Les - : la mise en abyme avec le neveu
Appréciation : 3,5/5

Stellabloggeuse
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« Je voulais juste museler ce monstre qui mord au ventre. Ce monstre, on l’appelait le désir. J’avais quinze ans et je n’en savais rien. Le lit de mes parents n’était jamais défait. Tout était en ordre, les machines tournaient toutes dans le même sens. Elles virginisaient les vies de tous qui avaient fourré dans leurs gueules leur linge sale. C’est ça que je regardais depuis ma naissance. J’avais appris à marcher dans cette salle, j’avais appuyé mille fois mes mains et mon nez contre ces hublots. Je voyais se faire le propre, c’était tout l’héritage de ma mère, les corps n’avaient pas d’odeur, la famille n’avait pas d’histoire, les enfants n’avaient pas de sexe. Le monstre était dans ma tête. Il suffisait de ne plus désirer. Prendre la peau pour ce qu’elle est – un vêtement qu’on lave comme un autre. Oublier qu’elle peut être cette surface d’échange vertigineuse avec le vent, la chaleur, l’eau. Avec les autres. »

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