mardi 6 octobre 2015

Bluebird, de Tristan Koëgel : le blues du Delta

[Didier Jeunesse, 2015]

Sur le thème de la ségrégation, j’avais beaucoup aimé « Sweet sixteen » d’Annelise Heurtier (non chroniqué), ou « Les faibles et les forts » de Judith Perrignon. C’est un thème fort, que j’aime bien retrouver dans les romans. L’idée de le trouver associé à la musique dans le dernier roman de Tristan Koëgel m’a donc donné envie de le lire.

Résumé

Dans l’Amérique des années 1940, Minnie et son père Curtis sillonnent les routes du delta du Mississipi avec leur guitare, leur harmonica et cette musique blues de laquelle ils vivent en la chantant dans les bals, les pique-niques, les plantations. Lorsque Minnie se tord la cheville, leur destin prend un tour inattendu et se lie à celui des travailleurs d’une plantation. Entre ses rêves de gloire et la quête d’un amour à priori impossible, Minnie va défier les lois qui séparent les hommes blancs des noirs.

Un roman musical

En lisant la quatrième de couverture, je m’attendais à quelque chose de plus romanesque, avec une grande histoire d’amour contrariée. Il n’en est rien, le roman est davantage centré sur la vie de la plantation et sur la musique. Le blues du Delta est en effet omniprésent, davantage que le thème de la ségrégation, qui est finalement peu approfondi, même s’il revient régulièrement. C’est donc avant tout un roman autour de l’ascension d’une chanteuse de blues.

Une intrigue peu crédible

Mais si le fond est intéressant, j’ai trouvé ce roman trop angélique. En voulant faire un pied de nez à la ségrégation, l’auteur multiplie les heureuses coïncidences, jusqu’à en perdre sa crédibilité. Ainsi, ce roman qui aurait pu être puissant émotionnellement parlant est finalement assez creux.

Les personnages

Je ne me suis pas vraiment attachée au personnage de Minnie, obnubilée par la poursuite de son rêve de gloire et assez peu mature. J’ai préféré son père, le songster, ou l’Indien Nashoba, plus attachants. Quant à Elwyn, je n’ai pas vraiment réussi à le cerner, même si nous passons plus chapitres en sa compagnie.

L’écriture

Quant à l’écriture, elle est assez orale. Ainsi, lorsque Minnie s’exprime, le texte est dépourvu de négations, comme si elle racontait-elle-même son histoire au coin du feu. Dans l’ensemble, cela ne m’a pas trop dérangée, il y a suffisamment de détails et de descriptions.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai été un peu déçue par ce titre, moins romanesque et moins puissant émotionnellement parlant que je ne l’aurais imaginé, d’autant plus que je ne me suis pas vraiment attachée aux personnages. Il vaut néanmoins le détour pour son aspect musical et pour découvrir le quotidien d’une plantation dans l’Amérique de la ségrégation, avant que l’intrigue ne prenne un tour trop angélique. Pour bons lecteurs à partir de 14 ans.

Note : 3/5
Stellabloggeuse
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« Il était né esclave, Papy, les fers aux pieds. Il avait vu la guerre, aussi, entre les Etats du Nord et ceux du Sud. Et quand elle s’était terminée, il avait cru, comme les autres, que les choses iraient mieux. Mais il s’était retrouvé interdit de toilettes, de trottoirs, de fontaines publiques, de restaurants. Il n’avait plus de chaines aux pieds, mais les maillons de celle qui le liait aux champs étaient encore plus difficiles à supporter. En plus de lui lier les chevilles, ils lui faisaient saigner le cœur. »


« On y est, on y est… mais où ? Par réflexe, j’ai reculé. Tout nous est tombé dessus. Les voitures, les immeubles, la chaleur, tout. Moi qui croyais que le Delta Queen était grand… Bon sang, mais ces immeubles ! On en voyait pas le bout. Qui avait pu construire ça ? On pouvait loger toute la plantation dans un seul de ces bâtiments ! […] Là, on ne pouvait que se rendre compte qu’on était complètement écrasés par la ville. Et le pire, c’est que ça ne choquait que nous. »

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