dimanche 26 avril 2015

Buvard, de Julia Kerninon : quand un écrivain affronte son passé

[Le Rouergue, 2014]

Aujourd’hui, on continue avec un auteur premier roman sélectionné pour le Festival de Chambéry ! Je me souviens avoir lu de bonnes critiques sur « Buvard » de Julia Kerninon au moment de sa sortie, c’était l’occasion de le découvrir.

Résumé

Lou, un jeune étudiant assez naïf, est fasciné par l’œuvre de l’écrivain Caroline N. Spacek et décide d’aller à sa rencontre pour l’interviewer, car il ressent le besoin de la comprendre. Après un accueil pour le moins brutal, elle l’invite à s’installer chez elle et lui livre son passé au fil des jours, entre quelques pâtisseries, cocktails maison et séances de jardinage.

Une vie marquée par la littérature

J’ai été rapidement happée par ce roman puissant : on entre de plain-pied dans la vie de Caroline et l’on n’a plus envie de la quitter avant de tout savoir, avant de la comprendre un peu mieux. Le roman résulte d’une habile mise en abyme, il se veut le résultat des interviews réalisées par Lou, entrecoupé de ses propres réflexions.

Au centre du roman, le passé de Caroline qui est un personnage assez fascinant, j’y reviendrai plus tard. Elle nous raconte son ascension fulgurante, elle qui venait d’un milieu populaire, d’une « prairie » selon ses propres mots. Mais elle aborde aussi et surtout la littérature, qu’elle a rencontrée brutalement à l’âge de 18 ans et qui l’a consumée toute sa vie. Il est question de l’incompréhension, de la déformation des écrits par ceux qui les reçoivent, lecteurs ou journalistes. Sur un plan plus personnel, elle nous livre ses amours et la difficulté qu’elle a eue à leur faire de la place.

Les personnages

Caroline est un sacré personnage de roman, comme on en rencontre peu. Jeune, c’est un bulldozer qui parle avec ses poings et s’exprime par le corps, qui se destine à une carrière de serveuse ou de tenancière de snack. Puis elle est kidnappée par la littérature, au sens littéral, et elle l’habite entièrement. C’est un personnage au caractère de feu, qui part au quart de tour, submergé par la colère. Elle est à la fois forte et fragile, enfantine et pleine de sagesse. Elle peut se montrer détestable, et pourtant on s’attache à elle.

Quant à Lou, son personnage sert surtout de faire valoir, même s’il nous livre des brides de son passé et de sa romance avec Piet. Ce que l’on apprend sur lui est, à mon sens, du glauque inutile. L’intérêt réside dans la résonance avec le passé de Caroline. Et sans doute fallait-il un personnage aussi innocent pour recueillir la vie torturée de l’écrivain.

L’écriture

Le style est la grande qualité de ce roman. Il est terriblement affirmé pour un premier roman, on est déjà dans la littérature. Ce qui me laisse penser que Julia Kerninon a déjà des années d’écriture derrière elle. Elle trouve les bonnes formules, les phrases percutantes, j’ai eu régulièrement envie de relever des citations, vous en trouverez quelques-unes à la fin de l’article. Un écrivain à suivre !

En quelques mots…

Ainsi ce premier roman est surprenant par son style déjà très affirmé et très littéraire, et par la force de son propos autour de l'écriture et de ce qu'elle coûte aux écrivains. L’auteure a construit un personnage fort, marquant, que l’on a envie de suivre même si Caroline est parfois antipathique. A découvrir.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Je commençais à penser que j’avais été présomptueux, que ce n’était pas si facile que ça d’interviewer un écrivain, puisque la vérité n’était jamais une base pour eux, mais plutôt une destination, puisqu’ils maîtrisent si bien la fiction que tout ce qu’ils pouvaient imaginer sonnait vrai. »

« Elle me criait dessus, elle éprouvait ses phrases contre mon oreille, mais elle les connaissait par cœur. Elle avait beaucoup plus de souvenirs que ce qu’elle avait proclamé au départ. Elle savait très bien où elle allait parce qu’elle allait à reculons. Elle plongeait la tête en arrière comme une nageuse. Dos crawlé. Jour après jour après jour. »


« J’ai appris ça en vieillissant, Lou – que j’aimais les paysages et qu’il n’y a pas de douleur insupportable, simplement des moyens de plus en plus terribles et épuisants d’y faire face »

jeudi 23 avril 2015

Les mondes d’Ewilan, tome 3, de Pierre Bottero : Les tentacules du mal

[Rageot, 2005]

*Attention il s’agit du tome 3 d’une série, présence de spoilers sur les tomes précédents*

J’ai pris l’habitude depuis quelques années de déguster régulièrement du Pierre Bottero, à petite dose, pour ne pas épuiser trop vite sa bibliographie. Après avoir lu le tome 2 de « A comme association », il était temps pour moi de clore les trilogies d’Ewilan en découvrant enfin « Les tentacules du mal », troisième tome des « Mondes d’Ewilan ». J’avais beaucoup aimé le premier tome, un peu moins le second qui faisait surtout office de transition.

Résumé

Après leur passage à l’Œil  d’Otolep qui a guéri Ewilan et l’a dotée de nouveaux pouvoirs pour contrer Ahmour, la Méduse qui hante les Spires, la petite troupe est en route pour Valingaï. L’objectif est triple : retrouver Altan et Elicia, ramener Illian chez lui et vaincre une bonne fois pour toute Ahmour avant qu’il ne puisse se matérialiser dans la réalité, ce qui aurait de terribles conséquences.

Un nouveau monde

Ce tome se déroule exclusivement sur les terres qui se situent à l’Est de Gwendalavir. Nos amis doivent franchir la Mer des Brumes et le Désert d’Ourou avant d’accéder aux cités de ces terres inhospitalières. Nous découvrons donc encore une fois un nouveau monde, avec ses créatures, ses peuples et ses guerres. J’ai particulièrement apprécié les Haïnouks, les fils du vent qui vivent sur des voiliers terrestres.

Une intrigue pleine de rebondissements

En ce qui concerne l’intrigue, ce tome 3 est excellent. Les rebondissements s’enchaînent, l’histoire se complexifie au fur et à mesure des chapitres. Ewilan et ses amis ne sont pas au bout de leurs peines ! Les épreuves sont de plus en plus difficiles, et pour une fois les personnages ne s’en sortent pas trop facilement, sauf peut-être à la toute fin. En tout cas j’ai beaucoup aimé tout ce qui a été mis en place autour d’Ahmour et notamment la bataille d’Hurindaï. J’ai un peu moins apprécié les histoires personnelles et incompréhensions amoureuses.

Les personnages

Dans ce tome, on retrouve une Ewilan moins arrogante et plus préoccupée. Elle reste moins attachante que dans le tout premier tome de la trilogie, mais elle se remet un peu en question et se montre prête à faire don d’elle-même pour sauver ses amis. Salim est toujours un peu en retrait, à mon grand regret. L’intrigue fait plus de place à Mathieu et Siam, mais je n’ai pas trop apprécié ce pan de l’histoire. Edwin assume son rôle de chef, même s’il doit pour cela se montrer inflexible par moments. Enfin Illian reste un personnage très intéressant, soumis à d’étranges variations d’humeur.

L’écriture

Quant à la plume, est toujours aussi délicieuse. Descriptions soignées, bons mots, dialogues vifs et pleins d’humour, introspection et émotion… tous les ingrédients d’un excellent Bottero sont présents !

En quelques mots…

Ainsi, ce troisième tome clôt en beauté les trilogies d’Ewilan. L’intrigue est palpitante et imprévisible, elle se complexifie au fil des pages. Seule la fin reste un peu facile à mon goût, mais j’ai passé un excellent moment en compagnie de ces personnages que j’apprécie et cette plume magnifique. A lire sans modération !

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« C’est le lot des garçons que de vivre, incompris, des histoires d’amour dramatiques. […] Nous en sommes réduits à réciter, dans les cavernes désertes de nos cœurs dévastés, des odes qui les feraient vibrer si elles prenaient le temps de les écouter. Nous nous jetons à leurs pieds, elles nous tournent le dos. Nous brûlons d’une flamme haute et pure, elles ne s’y réchauffent pas. Les hommes sont des poètes méprisés ! »

« - Tu t'exprimes avec tant d'assurance que ta folie en deviendrait presque contagieuse. Nous sommes onze, tu me l'as rappelé à l'instant. Onze face à des milliers de Valinguites, des prêtres fous, un démon et une Sentinelle aussi dangereuse qu'un serpent.
- Tu oublies les Géants du Septentrion et les bêtes sauvages.
Ellana lui caressa la joue du bout des doigts. Elle avait compris depuis longtemps que le sentiment qu'elle éprouvait pour Edwin l'entraînerait sur des chemins périlleux. Des chemins que, pour rien au monde, elle n’aurait quittés.
- Tu as raison, murmura-t-elle. Nous allons faire tout ça demain et en plus nous allons bien nous amuser. »

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Ce roman fait partie du challenge :



Challenge New Pal 2015 : 9/75

lundi 20 avril 2015

The book of Ivy, d’Amy Engel : mariage arrangé et trahison

[Lumen, 2015]

« The Book of Ivy» est le premier roman d’Amy Engel, jeune auteure américaine. J’étais intriguée par cette dystopie évoquant l’union de deux familles rivales, à la manière d’un Roméo et Juliette détourné où la jeune fille est supposée tuer son mari. Je n’ai donc pas hésité lorsque Babelio a proposé ce titre lors de son opération « Masse Critique. »

Résumé

Après une guerre nucléaire qui a ravagé la surface de la Terre, la quasi-totalité de l’humanité a disparu. Aux Etats-Unis, une petite communauté de survivants s’est constituée. Elle rassemble à peine dix mille habitants. Ivy Westfall est la descendante du fondateur de la ville. Elle doit à présent épouser Bishop Lattimer, le fils du Président, le descendant de l’homme qui a ravi le pouvoir à sa famille et instauré une société étroitement contrôlée. Sa mission : le tuer pour permettre l’avènement d’une démocratie.

Entre La Sélection et Roméo et Juliette

Ce roman propose une idée de base prometteuse, à mi-chemin entre La Sélection de Kiera Cass pour les mariages arrangés et le contexte, et Roméo et Juliette pour l’union des deux familles rivales. L’enjeu est simple : savoir quel camp Ivy va trahir, celui de son mari et de sa belle-famille, ou sa propre famille. L’histoire développée est celle d’un jeune couple qui fait tout juste connaissance et qui apprend peu à peu la vie conjugale, alors que ces jeunes gens ont 16 et 18 ans.

Addictif et parfois surprenant

De manière générale, j’ai trouvé le roman plutôt réussi, j’ai été embarquée même s’il y a peu d’action et beaucoup de réflexion, Ivy se demandant sans cesse comment agir au mieux. J’ai trouvé le contexte général peu étoffé, le roman n’aborde quasiment pas le système politique mis en place dans cette ville, ou seulement par petites touches. C’est donc davantage une romance un peu particulière qu’une dystopie, à mon sens. Quant à la fin, elle est surprenante, inattendue. Je l’aurais davantage appréciée si les dernières pages avaient été cohérentes avec l’attitude d’Ivy à sa sortie de la salle d’audience (pour ceux qui l’ont lu vous comprendrez, pour les autres je n’en dirais pas plus). Il y a là quelque chose qui me chiffonne. La porte est en tout cas laissée ouverte pour une éventuelle suite (edit : une suite paraîtra effectivement aux Etats Unis en novembre 2015 !).

Les personnages

Ivy est un personnage attachant. C’est une jeune fille entière, qui se laisse facilement emporter par ses émotions. Il est très difficile pour elle d’être dans la duplicité et de ne pas dire ce qu’elle a sur le cœur. Elle manque cruellement de confiance en elle et essaie de trouver son chemin entre les tentatives de manipulation des uns et des autres. Quant à Bishop, on ne peut que l’apprécier. D’abord mystérieux, il révèle un grand cœur et une certaine indépendance d’esprit. Peut-être même est-il un peu trop parfait !

L’écriture

Quant à la plume, elle est plutôt agréable, la traduction me semble assez soignée. Le texte est écrit à la première personne, nous sommes constamment dans la tête d’Ivy. Les descriptions et les introspections sont réussies et les dialogues intéressants. Rien à redire !

En quelques mots…

Ainsi ce roman m’a agréablement surprise. Je me suis prise d’affection pour ce jeune couple issue d’un mariage arrangé, et surtout pour Ivy qui est un personnage intéressant. Si la dystopie n’est pas assez creusée à mon goût, la romance est bien menée. Seule la fin m’aura laissée un brin perplexe car je ne savais pas encore qu'il y aurait bel et bien une suite. En tout cas ce roman devrait beaucoup plaire aux adolescentes, à partir de 14/15 ans.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Pour elles, pour tous les autres, cette cérémonie est un moyen de maintenir la paix et la cohésion de notre nation. Ils honorent une tradition qui permet de consolider, depuis plus de deux générations, une société menacée de disparition. […] je ne suis en rien comme ces adolescentes qui m’entourent. Epouser Bishop Lattimer, ce n’est pas accomplir mon destin. Ma mission n’est pas de le rendre heureux, de porter ses enfants et d’être sa femme. Ma mission, c’est de l’assassiner.»

« Mon père nous racontait toujours la façon dont se passaient les choses avant-guerre, qu’il tenait de son propre père. Des femmes juges et médecins, des femmes qui se présentaient même aux élections présidentielles. Bien sûr, ce n’était pas le cas de toutes. Il y en avait encore qui restaient au foyer pour élever leurs enfants. Mais il s’agissait d’une décision, et non d’une voie imposée. A l’époque, les femmes étaient autonomes, elles choisissaient leur conjoint, leur métier, elles étaient libres d’opter pour un chemin ou un autre. Un rêve très lointain pour moi. »
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Ce roman fait partie du challenge :



Challenge ABC 2015 : 15/26

lundi 13 avril 2015

Un tout petit rien, de Camille Anseaume : 9 mois en toute intimité

[Kero, 2014]

Cette année encore, je m’intéresse à la programmation du Festival du premier roman de Chambéry. Parmi les auteurs sélectionnés cette année figure Camille Anseaume et son roman « Un tout petit rien ». Ce titre ayant de plus été plébiscité par Cajou il y a quelques mois, c’est l’un des premiers que j’ai eu envie de lire.

Résumé

Dans ce roman qui comporte une part d’autofiction, une jeune femme de 25 ans tombe enceinte par surprise, par erreur. Son compagnon de quelques soirs annonce immédiatement qu’il ne sera pas le père de cet enfant. La voici donc seule face à son choix, celui d’interrompre cette grossesse et reprendre le cours de sa vie, ou la poursuivre et la bouleverser à jamais.

Un roman addictif

Grâce à ses très courts chapitres – pas plus d’une page ou deux, parfois juste un petit paragraphe – ce roman a un côté assez addictif, on a sans cesse envie de tourner la page. Malgré le sujet et la gravité du début, il y a de la douceur dans ce roman, une introspection sans précipitation, dans laquelle je me suis laissée happer. C’est un roman intimiste qui nous fait ressentir et penser la grossesse, qui nous trotte en tête même lorsque le livre est refermé.

Un thème universel

Quant au thème, il m’a touchée. Nous suivons une jeune femme dont la grossesse commence par un terrible choix. Il n’y aura pas de retour en arrière possible et sa décision affectera sa vie toute entière. Nous oscillons avec elle entre angoisse, espoir, douceur, acceptation, culpabilité, désirs d’avenir. Au fil des semaines, on entrevoit peu à peu ce que devenir mère implique. J’ai trouvé le thème bien traité, avec sincérité et authenticité, même s’il y a quelques redondances autour de la qualité de « mère célibataire » du personnage.

Le personnage

La narratrice est un personnage attachant. Vive, pleine d’humour, c’est encore une femme-enfant lorsque la grossesse la frappe de plein fouet. Au fil des pages, elle renonce peu à peu à son insouciance – mais pas à ses petites folies – pour penser en mère et en adulte. Elle est à la fois forte et fragile, comme nous le sommes toutes. Elle affronte l'incompréhension de ses proches avec patience et abnégation. C’est un personnage auquel on peut facilement s’identifier et que l’on prend plaisir à suivre.

L’écriture

Camille Anseaume tient un blog, « Café de filles », et cela se sent à la lecture de son roman. Les paragraphes sont courts, la plume est vive et va à l’essentiel. Il y a de l’humour, son style est pétillant, énergique, et elle fait preuve d’autodérision. Mais elle ouvre aussi la porte à l’émotion et nous offre de très jolis moments. Son écriture est efficace, mais jamais négligée, et la lecture a été plaisante.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai passé un très bon moment en compagnie de ce roman, qui est addictif par ses chapitres très courts et l’attachement que l’on éprouve pour le personnage. C’est un roman qui fait réfléchir sur la grossesse, sur cette folie de donner la vie…et qui, dans l’ensemble, donne envie de commettre cette folie. C’est un roman vif, doux, et parfois émouvant, que je vous conseille volontiers.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« L’incompréhension est à son point culminant.
Ils doutent que je doute, alors que je ne suis qu’un doute.
Une hésitation qui prend le métro, une incertitude qui se lève et se douche, une indétermination qui essaye d’avaler un truc à manger, un point d’interrogation qui cherche le sommeil. »


« Elle s’excuse de sa joie. Me dit que pardon, elle a été bête. Que c’est juste qu’elle trouve qu’il n’y a pas de bon moment pour avoir un enfant. Que ça ne peut jamais être le bon moment pour faire quelque chose d’aussi inconscient. Qu’il n’y a pas de bon moment pour devenir assez fou au point de décider « ça ». Que c’est toujours trop tôt, et un jour, trop tard. »

vendredi 10 avril 2015

A kiss in the dark, de Cat Clarke : amour et imposture


Après avoir bien aimé « Confusion » malgré ses ficelles trop évidentes, après avoir été renversée et tourneboulée par « Revanche » qui a été l’un de mes coups de cœur 2013, j’étais curieuse de découvrir « A kiss in the dark », le dernier titre de Cat Clarke paru en France à ce jour (un autre est à venir tout bientôt). Et une nouvelle fois, l’audacieuse Cat Clarke surprend !

Résumé

Entre Kate et Alex, c’est pratiquement le coup de foudre ; Lorsque les deux jeunes gens se rencontrent lors d’un concert, après quelques semaines de discussion en ligne, le courant passe immédiatement. Mais suite à un quiproquo qu’Alex ne prend pas la peine de rectifier immédiatement, un énorme malentendu s’installe au centre de leur histoire d’amour… au point de tout gâcher ?

Une première partie dérangeante

Il est TRES difficile de parler de ce roman sans révéler le point critique de l’intrigue. Comme il n’est pas mentionné dans la quatrième de couverture, j’aimerais vous laisser la surprise, même si ce « secret » est révélé dès les premières pages du roman. Donc, ce que je peux vous dire, c’est que cette histoire est assez dérangeante, car elle nous fait vivre une histoire d’amour qui repose sur une imposture. J’ai ressenti un certain malaise en lisant la première partie intitulée « avant », racontée du point de vue d’Alex et qui se situe avant la découverte de l’imposture. Néanmoins j’ai suivi avec intérêt cette romance, je me suis prise au jeu.

Une deuxième partie sous le signe de la vengeance

Quant à la seconde partie, intitulée « après », elle est racontée du point de vue de Kate après que cette dernière ait découvert la vérité. Cette partie est placée sous le signe de la vengeance, mais pas de la même manière que dans « Revanche » où elle est froidement calculée : ici la situation échappe à Kate dès le départ et elle n’a plus le courage de revenir dans le droit chemin. La fin m’a surprise, Cat Clarke ne nous avait pas habitués à cela, mais elle est un peu facile à mon goût.

Paragraphe SPOILER

Ne lisez ce paragraphe que si vous avez déjà lu le roman, il révèle un point clé de l’intrigue.
Si l’on délaisse l’intrigue en elle-même pour parler du thème, j’ai apprécié que Cat Clarke aborde le thème de l’homosexualité et du travestissement, même si elle a choisi un angle très atypique pour cela. On est à la limite de la crédibilité, mais les sentiments des personnages sont touchants et le thème vaut la peine d’être abordé.

Les personnages

Dans l’ensemble, j’ai bien aimé Alex qui est un personnage assez touchant malgré l’énormité de son mensonge et les dégâts qu’il occasionne. Son sens du sacrifice dans la seconde moitié du roman rattrape en partie ses erreurs. C’est un personnage à la fois fort et fragile. Quant à Kate, il est plus difficile de l’apprécier car on la découvre après la révélation de la supercherie, pleine de haine et de désir de vengeance. Si on assistait à la naissance de ses sentiments, je pense que la perception serait différente. C’est un personnage qui manque de confiance en elle. J’ai compris ses motivations et ses peines, pas toujours ses actions.

L’écriture

En ce qui concerne le style, le registre de langage est moins familier que dans les autres romans de Cat Clarke, il est plus neutre. L’ensemble est simple, fluide, direct. Son écriture (ou la traduction) continue à progresser, comme je l'avais déjà souligné pour "Revanche". Les discussions se tiennent et les introspections des personnages sont assez réussies.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai été dérangée par cette histoire, par cette romance qui repose sur une supercherie, avec un personnage qui fait de nous son complice. Néanmoins le thème que cela permet d’aborder en vaut la peine, et je me suis prise d’intérêt pour les personnages et leur histoire d’amour. En revanche il y a un petit manque de crédibilité, surtout concernant la fin, trop facile à mon goût. C’est un roman sur l’amour, les secrets et la vengeance. Principalement pour adolescents, à partir de 15 ans.

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Du thé et de la sympathie... Comme si ça arrangerait quoi que ce soit. Que les derniers mois de ma vie n'aient jamais existé, voilà ce dont j'avais besoin. Que mon coeur soit intact.
Et que mon Alex existe. »

« La violence de la situation m’a frappée tout à coup. A quoi avais-je pensé ? Comment avais-je pu faire une chose pareille ? Quelque part en cours de route, j’avais zappé que j’étais dans la vraie vie, que vivre c’est parfois difficile et bordélique, que les gens peuvent vous faire du mal, mais que ça ne vous autorise pas à les détruire. »

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Ce roman fait partie des challenges :

Challenge ABC 2015 : 14/26

 Challenge New Pal 2015 : 8/75

Challenge 100% R : 23e lecture

mercredi 8 avril 2015

Miss Peregrine et les enfants particuliers, de Ransom Riggs, tome 2 : Hollow City


*Attention, il s’agit du second tome d’une saga, présence de spoilers sur le tome précédent*

« Miss Peregrine et les enfants particuliers » de Ransom Riggs a été l’une des lectures qui m’ont marquée en 2013, tant par l’objet livre en lui-même avec son papier épais et ses photographies anciennes, que par son histoire au carrefour de plusieurs genres littéraires. Je me suis donc réjouie de la sortie du second tome de cette histoire, intitulé « Hollow City ».

Résumé

Depuis que la boucle de Cairnholm a été envahie par les Creux, Jacob et les enfants particuliers sont en fuite. Ils ont réussi à délivrer leur directrice, Miss Peregrine, mais elle est prisonnière de sa forme d’oiseau. Perdus dans l’Angleterre de 1940, poursuivis par des Estres grimés en soldats, ils vont alors de boucle en boucle à la recherche d’une ombrune capable de les aider…

Dans la lignée du premier tome

Malgré ma lecture assez ancienne du premier tome, j’ai très vite repris pied dans l’histoire et goûté cette ambiance particulière qui m’avait tant plue. Comme le premier tome, celui-ci est structuré autour de véritables photographies anciennes (certaines retouchées) issues de collections individuelles, qui font de ce livre un objet à part. Nous sommes toujours au carrefour de plusieurs genres romanesque, entre historique, fantastique et voyage dans le temps.

Des aventures trépidantes

Quant à l’intrigue, elle est haletante, les rebondissements se succèdent et le lecteur n’a pas un moment de répit. Les Estres sont aux trousses des enfants particuliers, et ils sont redoutables. Certaines scènes sont assez violentes, davantage que dans le premier tome, mais l’ensemble reste accessible à partir de 13 ans, à mon sens. Ainsi, c’est un véritable roman d’aventures que nous propose l’auteur, et la fin laisse le lecteur en plein suspense, dans l’attente terrible d’un troisième tome !

Les personnages

Livrés à eux-mêmes, les enfants particuliers révèlent un peu plus leur personnalité. Ainsi Bronwyn a un puissant instinct maternel, tandis que la petite Olive est plus courageuse que nombre de ses camarades. Enoch endosse le rôle du râleur pessimiste, et Horace pense avant tout à sauver leur peau avant de sauver le monde. Ils forment une petite troupe attachante, menée par Emma qui révèle son caractère de feu, et Jacob qui cherche sa place dans le groupe et dans le monde.

L’écriture

En ce qui concerne le style, l’écriture est fluide et agréable, dans la lignée du premier tome. Il n’y a pas de qualité littéraire particulière, mais une véritable ambiance, de bonnes descriptions et des dialogues crédibles.

En quelques mots…

Ainsi, ce second tome se place dans la droite lignée du premier, avec son ambiance particulière et ses photographies anciennes. Il est même meilleur car mené sur un rythme trépidant et un peu plus fouillé au niveau des personnages. Vivement le troisième ! Pour tous ceux qui aiment l’étrange, à partir de 13 ans.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Cette année 1940 qui, il y a quelques temps encore, se résumait pour moi à un lieu clos, sur une île. Un lieu que je pouvais quitter à volonté en me faufilant dans le boyau du cairn de Cairnholm. Depuis que nous avions fui l’île, c’était devenu un monde aux forêts touffues, aux villes surmontées de fumée, aux vallées traversées de rivières scintillantes ; un monde peuplé de gens et d’objets que je savais anciens, mais qui ne l’étaient pas encore. »

« J’aurais aimé trouver les mots pour la réconforter. Lui dire que rire n’aggravait pas les choses, pas plus que pleurer ne les arrangeait. Cela ne signifiait pas que l’on était indifférents, ni qu’on avait oublié. Seulement que nous étions humains. »

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Ce roman fait partie du challenge :



Challenge New Pal 2015 : 7/75 

vendredi 3 avril 2015

Le liseur du 6h27, de Jean-Paul Didierlaurent : un conte moderne réjouissant

[Au Diable Vauvert, 2014]

Voilà maintenant quelques années que je prends plaisir à lire des premiers romans, notamment ceux primés par le Festival du premier roman de Chambéry. Ils ont un charme particulier et sont parfois très surprenants. C’est le cas du « Liseur du 6h27 » de Jean-Paul Didierlaurent que j’ai dévoré le temps d’un voyage en train.

Résumé

Guylain Vignolles est un homme discret qui vit un quotidien assez morne, entre son travail à l’usine de recyclage de papier, son vieil ami Giuseppe et son poisson rouge. Mais chaque jour, il sauve quelques pages de livres des entrailles de la broyeuse à papier, des pages qu’il lit chaque matin à voix haute dans le RER qui l’emmène sur son lieu de travail.

Un conte moderne original

Ce roman est un joli conte moderne qui a su me happer. Il commence par la description d’une existence grisâtre et monotone, mais très vite il nous emmène ailleurs grâce à des jolies trouvailles qui m’ont souvent fait sourire. Son goût pour la lecture à voix haute emmènera Guylain dans de nouvelles expériences qu’il n’aurait pas pu imaginer et qui enchantent peu à peu son quotidien.

Un roman réjouissant et positif

Alors certes, la crédibilité n’est pas toujours au rendez-vous et les bons sentiments sont peut-être un peu trop présents, mais cela ne m’a pas dérangée une seconde : j’ai eu envie d’y croire et de me laisser emporter. C’est une lecture bonheur, réjouissante, qui a comblé mes attentes du moment. Ce roman m’a fait penser à « Le froid modifie la trajectoire des poissons » de Pierre Szalowski, il est tout aussi optimiste et positif.

Les personnages

Guylain est un personnage discret mais plein de qualités. Il est généreux envers son vieil ami Giuseppe, ingénieux pour faire le bonheur du vieil homme. Il a de l’empathie pour les plus faibles. Sa fragilité est plutôt touchante. Il côtoie quelques personnages hauts en couleurs comme Yvon qui ne s’exprime qu’en alexandrin. Enfin j’ai beaucoup apprécié Julie qui assume totalement ce qu’elle est et ne renonce pas à ses rêves.

L’écriture

J’ai apprécié le style de l’auteur, fluide, agréable et précis. Avant ce roman, il a écrit des nouvelles et cela se ressent dans les petits extraits que lit Guylain aux passagers du RER : en une page, il parvient à créer des situations, camper des personnages, et susciter des dizaines de questions. J’ai été assez admirative de cet exercice de style.

En quelques mots…

Ainsi, c’est un roman sans prétention qui m’a très agréablement surprise et m’a fait passer un bon moment de lecture. C’est une histoire originale et pleine de surprises, qui m’a réjouie. Ce roman nous offre un conte moderne auquel j’ai eu envie de croire, contre toute logique. Je le conseille volontiers à tous ceux qui ont envie de passer un bon moment.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Peu importait le fond pour Guylain. Seul l’acte de lire revêtait de l’importance à ses yeux. Il débitait les textes avec une même application acharnée. Et à chaque fois, la magie opérait. Les mots en quittant ses lèvres emportaient avec eux un peu de cet écœurement qui l’étouffait à l’approche de l’usine. »


« Il avait aimé ces moments de flânerie, à contempler les bateaux-mouches chargés de touristes glisser paresseusement sur les eaux argentées de la Seine. C'était bon de constater qu'il existait un autre monde que celui de la Stern, un monde où les livres avaient le droit de finir leur vie douillettement rangés dans les casiers verts le long des parapets en vieillissant au rythme du grand fleuve sous la protection des tours de Notre-Dame. »

mercredi 1 avril 2015

En mars 2015...

Le mois de mars a été un peu moins chargé en lectures avec un emploi du temps un peu moins facile. J'ai tout de même pu lire des genres variés et me faire plaisir avec quelques très bons titres!

Ce mois-ci, j’ai donc lu et/ou chroniqué :

Déceptions :

Après la peine, d'Ahmed Kalouaz (2,5/5)

Bien mais sans plus :

10 façons de bouleverser le monde (collectif) (3/5)
Constellation, d'Adrien Bosc (3/5)

J'ai vraiment aimé :

A comme association, tome 3, d'Erik L'Homme : L'étoffe fragile du monde (3,5/5)
L'âge des miracles, de Karen Thompson Walker (3,5/5)

    Ils m'ont "embarquée" :

La quête d'Ewilan, de Lilyan, tome 2 : Akiro (bande dessinée non chroniquée, 4/5) : un tome au-dessus du premier, les personnages sont mieux cernés, on est davantage dans l'esprit de Bottero et je me suis habituée au dessinTous les héros s'appellent Phénix, de Nastasia Rugani (4/5)
La 5e vague, de Rick Yancey, tome 2 : La mer infinie (4/5)





Ce qui fait 7 romans et une BD, soit un peu moins que les mois précédents, mais des lectures variées et agréables dans l'ensemble

Les chouchous du mois :
   


    Les articles les plus consultés par les visiteurs :

10 façons de bouleverser le monde (collectif) (61 vues)
Les sentinelles du futur, de Carina Rozenfeld (45 vues)
L'âge des miracles, de Karen Thompson Walker (33 vues)

  Le mois prochain je souhaite lire : 

-La symphonie des abysses, tome 2, de Carina Rozenfeld
-Buvards, de Julia Kerninon
-The book of Ivy, de Amy Engel
-A kiss in the dark, de Cat clarke 

  En ce moment je lis :


Du nouveau dans ma bibliothèque :

Aucun achat ou autre ce mois-ci, un vrai petit ange !

   Les visites du mois :

1068 pages vues (blogger ne permet pas de dénombrer les visiteurs uniques). 
Petit chiffre ce mois-ci, mais je ne suis pas très présente pour faire vivre le blog. et peu importe le nombre au final, chaque visite me fait infiniment plaisir, merci à tous.

Je vous souhaite à tous un bon mois d'avril et une bonne dégustation de chocolats, à très vite !

  Stellabloggeuse