samedi 28 février 2015

Nos faces cachées, de Amy Harmon : une romance prévisible mais agréable


Après « Eleanor & Park », me revoilà avec une romance, « Nos faces cachées » d’Amy Harmon, qui a fait le buzz sur la blogosphère des semaines avant sa sortie. Ayant fait "l’erreur" de lire ces deux romans quasiment l’un après l’autre, je vais essayer de ne pas trop comparer !

Résumé

Fern Taylor est petite, rousse et bouclée, et elle a porté un appareil dentaire pendant trois longues années de lycée. Autant dire que les garçons ne l’ont jamais vraiment regardée, mis à part son cousin Bailey qui est son meilleur ami et qui la voit telle qu’elle est : une fille forte et indépendante avec le cœur sur la main. Fern rêve de folles romances et elle en écrit. Elle rêve aussi d’Ambrose Young, la coqueluche de la ville qui lui est totalement inaccessible…jusqu’à ce qu’il ne le soit plus.

Une bonne lecture-détente

Ce roman, pour être apprécié à sa juste valeur, doit être vu pour ce qu’il est, c’est-à-dire une romance sans prétention. J’ai lu ces derniers temps plusieurs billets déçus de lectrices qui en attendait trop. Pour ma part, le contrat est rempli, les relations d’amour et d’amitié entre les personnages fonctionnent bien, il y a quelques scènes gentiment sensuelles, et l’histoire est portée par de bons personnages sur lesquels je reviendrai un peu plus bas.
Alors il est vrai que le dénouement est prévisible et un peu too much, il est vrai aussi que la narration est parfois un peu alourdie par les nombreux flash-backs, mais j’ai passé un bon moment de détente.

Des thèmes bien utilisés

J’ai bien aimé également l’idée d’utiliser le thème des attentats du 11 septembre et de la guerre en Irak, évènements qui ont sans doute marqué beaucoup de jeunes comme les personnages de ce roman. La maladie de Bailey est bien exploitée elle aussi, sans aller vers le pathos. Enfin, le thème de la beauté est au centre du roman et questionné tout au long de l’histoire, d’une manière assez intelligente. Pour s’aimer, les personnages doivent apprendre à voir au-delà des apparences.

Les personnages

Le roman est porté par le personnage de Fern, qui est une fille tout simplement géniale. Longtemps passé inaperçue, elle a pourtant une personnalité extravertie qui ne demande qu’à s’exprimer. J’ai adoré les moments où elle « se lâche », que ce soit dans la colère ou l’euphorie. Avec Bailey, ils forment un tandem de choc, agréablement décalé. J’ai beaucoup apprécié ce jeune homme toujours positif et déterminé à apprécier chaque moment de son existence. Quant à Ambrose, il est plus sombre. Lorsqu’il était lutteur, la pression de la victoire pesait lourd sur ses épaules. Aujourd’hui, ses problèmes ont pris une tout autre dimension, et il doit apprendre à vivre avec son passé.

L’écriture

Le style est simple et sans fioriture. La narration est faite au présent, avec de nombreux retours en arrière. Le langage est celui du quotidien, sans être trop familier non plus. Il n’a rien d’exceptionnel mais il n’est pas dérangeant.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai apprécié cette romance sans prétention qui m’a offert un agréable moment de détente. J’ai beaucoup apprécié les personnages, et particulièrement Fern qui est un sacré bout de femme. Il ne faut pas en attendre davantage, la romance est simple et la fin prévisible, même si des thématiques intéressantes sont abordées au cours du roman. Mais il n’y a pas la densité nécessaire pour distinguer ce roman des autres du même genre. Pour celles qui ont gardé leur cœur de midinette, à partir de 15 ans.

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Mais pour Bailey, la vraie vie, c’est maintenant ; chaque jour l’entraîne vers une fin inéluctable. Il ne devient pas plus fort mais plus faible ; il n’approche pas de l’âge adulte mais de la mort. Il ne porte donc pas sur l’existence le même regard que les autres. Il sait jouir de l’instant sans tirer des plans sur la comète. »

« Fern a décidé qu’elle n’aimait pas les super-héros, reprend son cousin depuis la banquette arrière. Elle se prenait pour une fée parce qu’elle aimait l’idée de voler sans avoir à sauver le monde. »
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Ce roman fait partie du challenge :


Challenge 100% R : 21e lecture

mardi 24 février 2015

Eleanor & Park, de Rainbow Rowell : une histoire d’amour intemporelle et touchante

[PKJ, 2014]

« Eleanor & Park » de Rainbow Rowell a fait parler de lui dès sa sortie l’année dernière, récoltant l’éloge des auteurs et des bloggueurs. Puis il est arrivé en bibliothèque, et mes collègues ont succombé les unes après les autres. J’étais donc plus que ravie lorsque ma très chère Cajou, qui l’avait beaucoup aimé, me l’a offert (je n’ai pas les mots pour te remercier suffisamment) et je me suis promis de ne pas le laisser traîner.

Résumé

Omaha, 1986. Quand Eleanor, la nouvelle du lycée, monte pour la première fois dans le bus, personne n’est décidé à lui faire une place. Différente – enrobée, habillée de manière excentrique, trop voyante – la petite bande qui fait la pluie et le beau temps dans le bus est bien décidée à lui mener la vie dure. Elle échoue à côté de Park et ils mettent tous deux un point d’honneur à s’ignorer. Jusqu’à ce qu’Eleanor commence à lire les comics de Park par-dessus son épaule…

Une magnifique romance

J’ai été complètement emportée par ce roman qui nous offre une vraie belle romance, de celles auxquelles on croit dur comme fer. L’histoire d’amour d’Eleanor et Park n’a rien de simple, elle est au contraire un combat de tous les jours, et pourtant elle est tellement belle… Justement parce qu’elle est à la fois évidente et contrariée. Leur histoire est racontée avec pudeur et simplicité, et beaucoup de justesse. Sans jamais en faire trop, l’auteure nous offre de très belles scènes et de vrais sentiments qui résonnent au plus profond de soi.

Au cœur des 80’s

En ce qui concerne la vie quotidienne des deux protagonistes, c’est tout aussi réussi. Rainbow Rowell nous plonge dans la seconde partie des années 80, au rythme d’Aerosmith, à la grande époque du punk et des comics, lorsqu'on écoutait de la musique sur des vinyles et des cassettes à bande magnétique. La vie familiale saine et équilibrée de Park alterne avec celle d’Eleanor qui m’a littéralement serré le cœur. Cette vie la met à part et elle essaie d’en faire une différence assumée, mais elle l’isole au lycée et fait d’elle la cible des moqueries. Ce contexte est habilement articulé avec la romance des deux jeunes gens, jusqu’à un final un peu rapide et plus brouillon que le reste du roman, mais qui est parvenu à me satisfaire.

Les personnages

Ce roman est porté par deux personnages impossibles à oublier. Park est lumineux, c’est un garçon qui est dans le don de lui-même et dans l’acceptation de son côté féminin (au grand dam de son père). Eleanor est beaucoup plus torturée. On la trouve très forte au vu de ce qu’elle endure chez elle, mais elle est aussi fragile, constamment sur le point de se briser, et il est impossible pour elle de se livrer à Park et de s’investir tant sa vie ne tient qu’à un fil. Je lui en ai parfois voulu de ne pas lui rendre tout ce qu’il lui donne, mais elle en est tout simplement incapable. La famille de Park m’a bien plu également, aimante et harmonieuse, elle a aussi ses failles et ses points de crispation.

Le style

On m’avait mise en garde contre le style de ce roman, et notamment sa traduction un peu maladroite, avec l’utilisation récurrente du passé composé. De fait, ce n’est pas du meilleur effet et on a connu plus jolie plume, mais cela ne pique pas non plus les yeux, et j’étais tellement plongée dans l’histoire que je n’y ai pas fait vraiment attention. Car en ce qui concerne la description des sentiments et l’émotion suscitée, c’est juste parfait.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai eu un franc coup de cœur pour ce roman porté par deux personnages inoubliables, qui nous propose une très belle romance contée avec finesse. J’ai été très touchée par les sentiments des deux jeunes gens. Les problèmes d’Eleanor m’ont serré le cœur et la personnalité de Park l’a illuminé. Je n’avais pas autant aimé un livre depuis « Nos étoiles contraires » de John Green. A conseiller à tous ceux qui ont envie de tomber amoureux, à partir de 14 ans.

Note : 5/5 (Coup de cœur)
Stellabloggeuse
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« Tout ce que je fais quand on est loin, c’est penser à toi, et tout ce que je fais quand on est ensemble, c’est paniquer. Parce que chaque seconde semble si importante. Et parce que je suis vraiment incontrôlable, je ne peux pas m’en empêcher. Je ne m’appartiens même plus, je suis à toi, et qu’est-ce qui se passera si un jour tu décides que tu ne veux plus de moi ? Comment est-ce que tu pourrais me vouloir autant que je te veux ? »

« Tout ce qui se disait dans cette maison était toujours désespéré.
Le désespoir n'était rien pour Eleanor ; c'était l'espoir qui lui tiraillait le cœur avec ses petits doigts. »

« Tu m’as sauvé la vie, a-t-elle essayé de lui dire. Pas pour toujours, pas pour de bon. Pour le moment en tout cas. Tu m’as sauvé la vie, et maintenant je suis à toi. Ce que je suis devenue maintenant est à toi. »
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Ce roman fait partie du challenge :


Challenge New Pal 2015 : 2/75

vendredi 20 février 2015

Une vie merveilleuse, de Dominique Brisson : une vie passée au crible des 26 lettres de l’alphabet

[Syros, 2014]

Je n’avais encore jamais lu de roman de Dominique Brisson avant ce jour. Alors que j’examinais la dernière commande arrivée à la bibliothèque, je suis tombée sur ce roman en forme d’abécédaire, et j’ai été intriguée par le concept.

Résumé

Dans sa chambre qu’il partageait autrefois avec sa sœur, Yanis parcourt l’abécédaire qui a suivi cette dernière depuis sa tendre enfance. Il en parcourt les contours, ce qui lui permet de revenir sur l’existence de cette sœur désormais absente, de leurs relations, et de la lente descente aux enfers de la jeune fille qui s’enfonce dans une forme de dépression rageuse…

Une structure intelligente

L’idée d’utiliser un abécédaire pour écrire un roman est intéressante et ludique (même s’il me semble qu’elle a déjà été utilisée), d’autant plus que c’est bien fait, il n’y a pas ce côté artificiel que l’on pourrait craindre. Nous nous imaginons sans peine ce jeune garçon de douze ans en train de parcourir l’abécédaire de sa sœur. Cette structure particulière nous donne des éléments sur leur existence à tous les deux, sans tout révéler non plus, il nous faudra lire entre les lignes

Mal-être et force

Le mal-être de la jeune fille est au centre du roman. Yanis nous explique comment sa sœur, ronde et solaire, est devenue peu à peu une ombre dévorée par la colère. Il ne comprend pas bien l’origine de ce mal, il est, tout comme le lecteur, un spectateur impuissant. Mais tout n’est pas noir car Yanis nous montre que malgré ses errances, sa sœur est parvenue à lui donner de la force, une capacité à tout affronter.

Les personnages

Yanis est un jeune garçon assez mûr pour son âge, et totalement dévoué à sa sœur. Il va aller jusqu’à lui faire ses devoirs pour lui éviter des ennuis ! Il est pourtant chétif et malmené par les autres, mais la détresse de sa sœur va l’amener à prendre le dessus sur ses faiblesses. C’est un personnage assez attachant. Quant à sa sœur, elle est lunatique et colérique mais, même si on ne la comprend pas, on ne parvient pas à lui en vouloir tant Yanis l’aime.

L’écriture

L’écriture est simple et abordable, l’auteure s’exprime par la bouche de Yanis, âgé de douze ans. Mais avec ces mots qui n’ont rien de compliqué, l’auteur parvient quand même à faire ressortir toute la complexité de ses personnages et de leurs sentiments.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai été plutôt convaincue par ce roman en forme d’abécédaire, cet hommage d’un jeune garçon à sa sœur qui lui en aura pourtant fait baver, mais qui lui a transmis sa force. La plume facilement abordable le rend accessible dès 10 ans, mais pour pleinement appréhender la thématique un peu difficile, je le conseillerais plutôt à partir de 12 ans.

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Maintenant, je me dis que ce secret est peut-être une chance, car grâce à lui, tous les soirs, avec l’abécédaire qui a migré de son mur sur le mien, je refais vibrer nos vies, je m’applique à coudre et à recoudre, en caressant à mon tour les petites aspérités du tissu, les idées et les émotions qui ont pu traverser son cerveau. Et ainsi, je peux trouver le bonheur et enfin m’endormir, avec en toile de fonds l’écho joyeux de nos pas sur la longue passerelle de fer qui enjambe la route et que nous empruntions tous les jours sur le chemin du collège. »


« Et même quand je passe la porte de notre chambre vidée de sa substance, que mes yeux se posent sur l’angle du mur que ma sœur a usé de ses rêves, je trouve que j’ai de la chance d’abriter dans mon cœur l’image de cette jeune fille à qui j’ai tout donné et qui en échange m’a légué cette force incroyable. »

mardi 17 février 2015

Charlotte, de David Foenkinos : belle intention, faible résultat

[Gallimard, 2014]

Vous ne rêvez pas, me revoilà avec un roman adulte, petit plaisir devenu rare. J’ai découvert David Foenkinos avec « La délicatesse », un roman dont j’avais beaucoup aimé le ton et la tendresse, tout en simplicité. Aussi, quand est sorti « Charlotte » et que les éloges ont commencé à pleuvoir, j’ai tout de suite eu envie de le lire. Le fait qu’il ait reçu le Goncourt des Lycéens, un prix généralement de bon jugement, n’a fait que renforcer ce désir.

Résumé

David Foenkinos s’empare ici du destin de Charlotte Salomon, artiste juive allemande qui a trouvé la mort dans les camps d’extermination en 1943 après avoir composé une œuvre monumentale, « Vie ? Ou théâtre ? ». Il imagine sa vie et sa personnalité, à partir de ses dessins et des informations qu’il a pu glaner, l’histoire d’une jeune femme marquée par la mort dès sa naissance.

Court mais répétitif

Je vais finir par croire que les prix littéraires ne sont pas pour moi, car j’ai été déçue par ce titre. Le roman est court, pourtant on tourne quand même en rond, on revient sans cesse sur la tragique histoire familiale de Charlotte marquée par les suicides, et sur l’obsession de Foenkinos pour cette artiste. Il y a effectivement de l’obsession dans le roman, on revient sur les mêmes thèmes. Mais il manque pour moi un but, une finalité à cette obsession. Il y a quelque chose de glauque, jusque dans la romance, qui m’a dérangée.

Un manque de densité

Au final, le roman est un peu creux, il est à peine plus qu’une biographie de Charlotte Salomon que l’on pourrait trouver sur internet, comme si l’auteur n’avait pas osé s’approprier pleinement sa vie. On en ressort intrigué, avec l’envie d’en savoir plus sur Charlotte car l’on n’a pas appris grand-chose, et déçu d’avoir trouvé si peu de densité dans le roman. Quant à la thématique de la Seconde Guerre Mondiale, ce roman n’y apporte rien de nouveau, rien que l’on n’ait lu ailleurs des dizaines de fois. Enfin l’auteur est à mon goût trop présent dans son roman, il se met trop en scène au détriment de son héroïne, il nous empêche d’entrer nous-mêmes dans l’histoire.

Les personnages

Charlotte est un personnage typique d’artiste torturée, rongée par ses démons personnels (ceux qui ont détruit sa famille) et par la Haine qui sévit en Allemagne dès le début des années 1930. Comme beaucoup d’artistes elle est très centrée sur elle-même, même si elle est capable de s’oublier complètement lorsqu’il est question de celui qu’elle aime. Les autres ne sont pas très marquants, à peine effleurés.

L’écriture

Le style est particulier, haché par un retour à la ligne à la fin de chaque phrase et des phrases plutôt courtes. Je ne crois pas que l’on puisse parler de poésie pour autant, comme certains se sont osés à le faire. Il n’y a pas selon moi de poésie dans ce roman, moins que dans « La délicatesse » en tout cas. On s’habitue à ce style mais il n’apporte rien de particulier à l’histoire, contrairement à celui de Valentine Goby dans « Kinderzimmer » par exemple.

En quelques mots…

Ainsi, au final, c’est un roman que j’aurais adoré aimer, mais qui m’a déçue. Sans être désagréable ou rébarbatif, il reste pour moi trop en surface et obsessionnellement centré sur quelques aspects de la vie de Charlotte Salomon. Le style se veut particulier, mais il n’apporte pas grand-chose. Je préfère largement lorsque David Foenkinos reste lui-même et qu’il ne cherche pas à jouer au grand écrivain, quand il est dans la tendresse et la légèreté, dans le quotidien... Je sais que beaucoup n’ont pas partagé cet avis, alors n’hésitez pas à venir en discuter.

Note : 2,5/5
Stellabloggeuse
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« Merci pour tes dessins. Ils sont naïfs, approximatifs, inaboutis. Mais je les aime pour la puissance de leur promesse. Je les aime car j'ai entendu ta voix en les regardant.
J'ai ressenti une forme de perte et une incertitude aussi. Peut-être même l'esquisse d'une folie. Une folie douce et docile, sage et polie, mais réelle. Voilà, ce que je voulais te dire. Nous sommes un très beau début. »

« Albert tente de rassurer sa fille comme il peut.
Mais existent-ils, ces mots qui atténuent la haine des autres ?
Charlotte se replie davantage.
Elle ne cesse de lire, rêve de moins en moins.
C'est à cette période que le dessin entre dans sa vie.
La passion de la Renaissance lui permet de quitter son époque. »
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Ce roman fait partie du challenge :


Challenge ABC 2015 : 7/26

samedi 14 février 2015

Les géants, de Benoit Minville : un roman familial sur la côte Basque

[Sarbacane, 2014]

De Benoit Minville, j’avais lu le premier roman intitulé « Je suis sa fille ». Si j’en avais apprécié le message, j’avais trouvé qu’il survolait un peu son sujet et que les personnages manquaient de vérité. Aussi, j’ai ouvert « Les Géants » avec un à priori légèrement négatif. Et j’avais tort.

Résumé

Marius, la vingtaine, pointe depuis deux ans au Pôle emploi et retape un vieux navire en rêvant d’une grande évasion. Il vit dans un village du Pays Basque, un petit paradis pour les surfeurs, dont il fait partie avec son meilleur ami, Esteban. Les deux familles, le clan de pêcheurs et le clan de gitans, sont unies comme les doigts de la main, face aux vacheries du quotidien. Mais la sortie de prison de César, le grand-père de Marius, un ancien du crime organisé pas rangé pour deux sous, va provoquer une vague de révélation qui va tous les ébranler…au risque de les briser ?

Une histoire de famille et de gangsters

J’ai vite regretté mes préjugés en avançant dans ce roman, qui est bien plus dense et plus maîtrisé que le précédent. C’est avant tout une histoire de famille, un thème qui me parle. Il y est question de la transmission des valeurs, et de la difficulté à communiquer qui s’installe lorsque les enfants grandissent. La relation père-fille m’a particulièrement touchée. Mais c’est aussi une histoire de gangsters, car César n’est pas là pour rigoler, c’est un dur, et il va provoquer un déchaînement de violence autour de lui. Son retour entraine également la révélation de secrets profondément enfouis qui vont provoquer un véritable séisme dans la famille.

Un hommage au Pays Basque

Le roman est également un hommage au Pays Basque, à son authenticité et à ses paysages, que je n’ai jamais vus mais que j’ai désormais l’impression de connaître. Le surf occupe une place de choix dans les activités des jeunes gens. Les habitants sont fiers et méfiants envers les touristes qui les envahissent chaque été, à l’instar de Marius. J’ai aimé l’association de tous ces thèmes et de ces paysages. Mes seuls bémols sont pour la romance, un peu trop appuyée et parfaite à mon goût, et la fin précipitée. J’aurais notamment aimé connaître la réaction de Marius vis-à-vis de César, et celle d’Alma face aux mensonges de sa famille.

Les personnages

Avec ce roman, l’auteur nous propose toute une galerie de personnages très vivants que nous apprenons à connaître. Marius cherche sa voie. Heurté par la dure réalité du marché de l’emploi, il ne se trouve pas de perspectives d’avenir. C’est quelqu’un d’impulsif, qui a en lui une violence enfouie qui menace de ressurgir à tout moment, la même qui habite son père et son grand-père. Sa sœur Alma est plus douce, elle souhaite juste être prise au sérieux et respectée. Esteban, son meilleur ami, est un sacré numéro, toujours prêt à dégainer une blague, mais on peut compter sur lui. J’ai particulièrement apprécié Bart, le petit frère d’Esteban.

Mais j’ai surtout été touchée par le personnage d’Auguste, le père de Marius, un père qui a fait de son mieux et qui se remet sans cesse en question, un taiseux qui fait des efforts pour exprimer ses sentiments. Quant à César, le patriarche gangster, je n’ai pas réussi à le cerner et je me suis beaucoup interrogée sur ses motivations.

L’écriture

Quant au style, il est assez agréable, simple et direct, dynamique. Il adopte les points de vue de différents personnages et se glisse aisément dans la peau de chacun. Les dialogues sont crédibles et vivants, et les descriptions réussies.

En quelques mots…

Ainsi, j’ai été agréablement surprise par ce roman plutôt dense, qui nous propose une histoire familiale complexe autour du secret et des mensonges, et de la transmission des valeurs. Le côté « gangsters » est un plus qui apporte du suspense. Le Pays Basque est mis en valeur. Le point fort du roman c’est sa galerie de personnages, tous très vivants, mais il souffre en revanche d’une romance trop idyllique et d’une fin abrupte. A lire à partir de 15/16 ans. Merci à Juliette et aux éditions Sarbacane pour cette lecture.

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Son cher Pays Basque, avec ses paysages charmeurs de rétines… Face à lui, les Pyrénées se dressaient, blotties sous une couronne de nuages. Dans son dos, c’était l’Atlantique et sa mélodie du ressac ; son terrain de jeux, là où naissaient ses plus grande sensations. »

"Des formules qui le fatiguaient encore plus que des slogans politiques. "Elle a poussé, dis-donc, ta petite"! Non, pauvre buse : elle avait muté sa petite ! Muté en une créature ambassadrice de la beauté avec laquelle il avait laissé s'installer, stupidement...une distance. La gêne d'admettre que sa fille était une femme ?"


« Regarde, petit frère : c’est chez toi, ici ; Regarde, petit frère. Notre étoile est là-haut, on est peut-être pas nés sous la plus brillante, mais on apprendra ensemble. A devenir. »

mardi 10 février 2015

Sœurs sorcières, tome 2, de Jessica Spotswood : un tome de transition

[Nathan, 2014]

*Attention, il s’agit du tome 2 d’une saga, présence de spoilers sur le tome précédent*

Souvenez-vous, cet été, j’ai dévoré et adoré le premier tome des « Sœurs sorcières » de Jessica Spotswood, un roman fantastique aux faux airs de Jane Austen. La fin nous laissait dans l’expectative, aussi j’étais très curieuse de ce tome 2.

Résumé

Cate a l’impression d’avoir tout perdu depuis qu’elle a dû quitter ses deux sœurs et Finn pour rejoindre l’ordre des Sœurs, au sein duquel les sorcières s’organisent en secret. Ces dernières sont dans l’attente d’un signe indiquant que la plus puissante sorcière de tous les temps est prête à les mener à la victoire. Mais en attendant, l’étau des Frères se resserre autour des femmes en général, et des sorcières en particulier…

Un tome de transition

Comme beaucoup de tomes deux malheureusement, ce roman a le défaut d’être un tome de transition : on est dans l’attente et il y a quelques longueurs. En effet, peu d’action dans ce roman, on assiste davantage à la mise en place d’alliances et à des manœuvres en sous-main qu’à de véritables avancées de l’intrigue. Cate est indécise, pèse le pour et le contre et analyse la situation. De plus, on perd le petit côté « Jane Austen » qui faisait le charme du premier tome.

Une lecture agréable

Néanmoins, cela reste une lecture très agréable. L’univers mis en place me plaît toujours autant, avec son côté dictatorial et la guerre larvée entre les Frères et les sorcières qui enfle de plus en plus. Les rapports entre les trois sœurs sont également intéressants et connaissent une évolution importante dans ce tome. Enfin, on se laisse prendre à la romance même si elle est un peu trop rose. Elle est en outre largement contrebalancée par une fin cruelle qui tombe comme un couperet ! Je ne sais pas encore si je l’ai appréciée ou si je suis en colère…^^

Les personnages

L’histoire est toujours contée du point de vue de Cate qui est un personnage attachant. Elle a apprivoisé ses pouvoirs, même si elle s’en méfie toujours, et à juste titre. Elle essaie de faire le bien et reconnait qu’elle se trompe parfois, elle fait simplement de son mieux. Enfin, elle se sent prise au piège par les sœurs, même si elle essaie d’accepter son destin. On l’aimerait parfois un peu plus fonceuse, mais son côté calme et réfléchi fait aussi partie de son charme. Tess a beaucoup grandi et se montre très mûre et décidée. Quant à Maura, elle est à la fois trop sûre d’elle et persuadée d’être toujours dans l’ombre de Cate, ce qui nourrit son ressentiment. Une situation explosive !

L’écriture

En ce qui concerne la plume, elle est égale à elle-même. La lecture est fluide et agréable, sans obstacles. Les descriptions sont suffisantes pour se représenter l’action et le contexte, il n’y a rien à redire.

En quelques mots…

Ainsi, ce tome est à mon goût nettement en dessous du premier, une transition qui comporte quelques longueurs. On est principalement dans l’observation et la manipulation, Cate tente d’identifier ses alliés et ses ennemis. Néanmoins l’univers me séduit toujours autant, ainsi que le trio explosif formé par les sœurs. La fin laisse présager un tome 3 terrible, que j’ai hâte de lire ! A lire dès 13/14 ans.

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse
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« Jusqu'à une date récente – je suis arrivée ici voilà six semaines à peine –, j'avais Tess sous les yeux du matin au soir, depuis le jour de sa naissance. Je me souviens même de son premier cri – un grand soulagement, après la venue d'un petit frère mort-né –, et de son petit visage rouge et fripé, la première fois que je l'ai vue. Quant à Maura… Nous sommes trop proches en âge pour que j'aie le souvenir d'une époque sans Maura. Elle a toujours été là pour se chamailler avec moi et me faire rire. J'en veux à l'ordre des Sœurs de nous avoir séparées. J'en veux à nos dons de magie qui leur ont dicté de le faire. »

« On dit que les nations sont façonnées par les guerres ; il se pourrait que les femmes aussi. La Nouvelle-Angleterre et moi, nous renaîtrons ensemble dans cette guerre entre les sorcières et les Frères. Entre *** et moi.
Je suis forgée d'un nouvel alliage – d'acier, de glace et d'adieux déchirants.
Mes pouvoirs sont renouvelés, revivifiés par mon cœur en charpie. Ils palpitent au bout de mes doigts, tournoient autour de moi. Le vent forcit, glacé à présent. La pluie se change en neige, auréole les réverbères dressés le long de la rue, tels des anges de fer. »

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Ce roman fait partie des challenges :


Challenge ABC 2015 : 6/26


Challenge New Pal 2015 : 1/75

samedi 7 février 2015

Le silence de Mélodie, de Sharon M. Draper : un personnage marquant

[Michel Lafon, 2015]

Me revoilà avec un livre recommandé par John Green himself, comment résister ? Les premiers avis des personnes ayant reçu les épreuves non corrigées du roman ont achevé de me convaincre de donner sa chance au « Silence de Mélodie » de Sharon M. Draper.

Résumé

Mélodie va bientôt avoir onze ans. C’est une jeune fille très intelligente, surdouée même, et son cerveau fourmille de pensées et de mots, de réflexions et de réactions. Mais voilà, Mélodie est physiquement handicapée et incapable d’exprimer tout ce qu’elle a en tête… Elle va pourtant tout faire pour qu’on l’entende.

Le handicap vu de l’intérieur

C’est un roman qui nous fait vivre le handicap de l’intérieur, un peu comme « Patients » de Grand Corps Malade que j’avais bien apprécié. En effet, Mélodie est incapable d’accomplir seule les gestes quotidiens : se nourrir, aller aux toilettes, même rester assise sans être attachée est pour elle mission impossible. Elle a un léger contrôle sur ses bras et sur ses jambes, mais jamais elle n’a pu exprimer le moindre mot, et c’est bien le plus difficile pour elle. Car Mélodie est loin d’être bête, elle est au contraire beaucoup plus intelligente que les gens qui l’entourent. Elle nous fait partager toute sa frustration d’être incomprise et sous-estimée, et on bouillonne avec elle.

Un roman sensible et équilibré

Selon moi, l’auteure a su trouver le bon équilibre pour son roman. On ne sombre pas dans l’apitoiement, mais on évite aussi l’écueil de l’angélisme. Alors oui, Mélodie est peut-être dotée d'un sacré atout avec sa mémoire photographique, mais elle doit endurer son lot de bêtise humaine et de maladresse. Celles-ci se retrouvent partout, des médecins à certains professeurs, en passant par les camarades de classe, y compris les mieux intentionnés d’entre eux. Mélodie est à l’écart, quelles que soient ses qualités, ou ses efforts pour s’intégrer. Elle est heureusement entourée d’amour. Le roman, très sensible, nous fait ressentir ses émotions, des plus belles aux plus dures. Rien n’est facile mais les épreuves sont affrontées, une par une.

Les personnages

Mélodie est un personnage fort, de ceux que l’on n’oublie pas de sitôt. Le roman est écrit de son point de vue, l’auteure utilise le « je », aussi on a la sensation de la connaître intimement. Elle est attachante par sa vivacité d’esprit, et son humour. Elle a aussi ses moments de découragement et de colère, elle est parfois injuste envers les imperfections de ses parents. Une petite fille presque comme une autre, en somme.

Elle est entourée par une famille aimante et attachante, qui l’aime de tout son cœur et est capable de voir toutes ses qualités. Sa voisine, Madame V. est une vraie perle, c’est elle qui lui a appris à affronter l’existence. Et puis il y a les autres, les professeurs, ceux qui veulent l’aider à révéler son potentiel et ceux qui veulent surtout qu’elle reste à l’écart, les camarades maladroits ou carrément hostiles, les médecins défaitistes… Il y aurait quelques paires de claques à distribuer, et ceux qui parviennent à traiter Mélodie en égale sortent du lot.

L’écriture

Quant au style, il est plutôt simple et fluide, bien adapté à sa narratrice surdouée de 11 ans. Tantôt drôle, tantôt émouvant. Rien à redire de ce côté-là, donc.

En quelques mots…

Ainsi, c’est un roman émouvant avec un personnage fort, de ceux que l’on n’oublie pas facilement. L’auteure a su trouver l’équilibre nous faisant vivre le handicap de l’intérieur, tout en évitant l’apitoiement et l’angélisme. Il m’a juste manqué un « petit quelque chose », un peu plus de profondeur, pour être vraiment emportée et que ce soit un coup de cœur. Mais j’ai été touchée. Un roman pour tous, à partir de 11/12 ans.
Merci à Camille et aux éditions Michel Lafon pour la découverte de ce titre.

Note : 4/5
Stellabloggeuse
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« Vous n’êtes pas si malin, monsieur, vous êtes juste veinard ! Tous ceux parmi nous qui ont toutes leurs facultés intactes ont de la chance, c’est tout. Mélodie est capable de comprendre des choses, de communiquer et de se débrouiller dans un monde où rien n’est adapté à elle. C’est elle, la plus maligne ! »


« J’ai envie de piétiner quelque chose. De taper et taper du pied comme une furie ! Et ça me rend encore plus dingue car même ça, je ne peux pas le faire. Je ne peux pas me fâcher comme une fille normale. »

mardi 3 février 2015

Enigma, tome 1 de Johan Heliot : Prédictions

[Rageot, 2014]

J’ai découvert Johan Heliot il y a quelques semaines avec « Ciel, tome 1 : L’hiver des machines », un roman de science-fiction. Je l’ai retrouvé ces derniers jours dans un thriller jeunesse intitulé « Prédictions », le premier tome de la série « Enigma ».

Résumé

Des jumeaux, Théo et Véra, vivent avec leur père écrivain de science-fiction. Leur mère est morte au moment de leur naissance. Lors d’une randonnée, le frère et la sœur découvrent deux cadavres. L’un d’entre eux porte sur lui un étrange smartphone, que Véra décide de garder avec elle. C’est le début d’une course-poursuite trépidante qui mêlera la NSA, une multinationale tentaculaire et le lanceur d’alerte Enigma…

Un thriller autour d’un sujet de société

Ce roman est bel et bien un thriller, l’intrigue ne s’arrête jamais et les pages se tournent facilement, les personnages sont pris dans un engrenage dont on souhaite connaître toutes les facettes. On peut le qualifier de thriller technologique, dont l’enjeu est le contrôle de l’information. Des chercheurs ont trouvé le moyen d’anticiper l’avenir, certains cherchent maintenant à le déterminer. Cette question de la maîtrise de l’information est cruciale dans nos sociétés hyperconnectées ou l’information est abondante mais peu contrôlée. L’auteur met ici le doigt sur un vrai sujet de société !

Un manque de crédibilité

En revanche, j’ai ressenti un cruel manque de crédibilité au cours de ma lecture. Si l’intrigue générale se tient, les obstacles sont franchis beaucoup trop facilement à mon goût. Le personnage de Véra, notamment, est beaucoup trop « balaise » à mon sens, notamment lorsque, sous sédatifs, elle parvient encore à échapper à ses ravisseurs ! Peut-être que cela ne gênera pas les jeunes lecteurs visés par ce roman (les adolescents de 12 à 15 ans), mais pour ma part, cela ne passe pas…

Les personnages

Les deux jumeaux sont très différents l’un de l’autre. Véra est un garçon manqué, une fonceuse qui n’a peur de rien, ce qui peut parfois empêcher de s’attacher vraiment à elle. Théo et ses incertitudes m’a souvent été plus sympathiques. Mais le tandem fonctionne bien, les jumeaux possèdent un lien particulier qui est bien exploité. Les adultes qui les entourent ne font pas le poids face à eux deux réunis !

L’écriture

Quant à l’écriture, elle est simple, assez peu littéraire mais très vive. A mon sens, elle est adaptée au genre du roman, le thriller.

En quelques mots…

Ainsi, l’auteur propose ici un thriller technologique autour d’un grand sujet de société : le contrôle de l’information. L’intrigue est trépidante, mais pas toujours convaincante. Le tandem de jumeaux fonctionne bien, mais Véra est un peu trop surhumaine à mon goût. A réserver aux ados entre 12 et 15 ans, qui sauront sans doute l’apprécier en étant moins gênés que moi par le manque de crédibilité.

Note : 3/5
Stellabloggeuse
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"35 % de la population mondiale utilise Internet et ce chiffre est en perpétuelle augmentation. Douze millards d'appareils sont connectés en réseaux et il y en a chaque jour de plus en plus. pour tous ces gens, comme vous dites, où croyez-vous que se situe la réalité ? Dans le monde qui les entoure ou dans celui des big data ? Ils sont incapables de distinguer une information avérée d'une autre fabriquée, car ils ne peuvent la vérifier que sur le Net. Qui contrôle l'information contrôle le monde, mademoiselle Luck. CQFD."