samedi 13 septembre 2014

La pluie, avant qu’elle tombe, de Jonathan Coe : trois générations de femmes

[Gallimard, 2009]

Si vous suivez un peu ce blog, vous connaissez mon amour pour Jonathan Coe, l’un de mes auteurs contemporains préférés. « La pluie, avant qu’elle tombe », est le dernier roman de son œuvre que je n’avais pas lu. Poussée par QuelBookan dont c’est le roman chouchou, j’ai fini par l’ouvrir à son tour.

Résumé

Isolée dans sa campagne du Shropshire, Rosamond vient de mourir. Mais elle laisse derrière elle une collection de cassettes enregistrées, destinées à la mystérieuse Imogen. Ne parvenant pas à retrouver cette dernière, Gill, la nièce de Rosamond, se décide à les écouter. Elle écoute Rosamond décrire pour Imogen vingt photos, qui marquent des étapes clés de la vie de Rosamond et mènent peu à peu au secret qui entoure la vie d’Imogen…

Un roman très féminin et bien mené

Selon moi, ce roman est à mettre à part dans l’œuvre de Coe, notamment parce qu’il est très féminin, tous les personnages importants de cette histoire sont des femmes, sur trois générations. Il a su, avec beaucoup de sensibilité, se glisser dans la peau de Rosamond. Il met ainsi en relief plusieurs destins, tous liés les uns aux autres. L’histoire est très bien menée, j’ai beaucoup aimé cette idée de décrire des photos pour revenir sur les tournants de la vie des personnages. Seule la fin m’a laissée assez perplexe, je me suis posée la question du but de l’auteur, du sens de tout ceci. Mais peut-être faut-il considérer que, comme souvent dans la vie, cela n’a aucun sens. Le trouver serait vain, comme il est vain de vouloir de goûter la pluie avant qu’elle tombe.

Une histoire de famille et d’amour

Rosamond fait la lumière sur l’histoire d’une partie de sa famille. L’enjeu du roman réside dans les relations mère-fille, dans le manque d’amour, dans les liens rompus faute de savoir s’y prendre. Les regrets, les secrets, les incompréhensions, les rendez-vous manqués dressent des murs infranchissables et occasionnent des drames. Il est également question de femmes qui aiment les femmes, qui dans les années 1950 et 1960 aspirent à vivre autrement. Ce thème est traité avec beaucoup de délicatesse et de justesse.

Les personnages

Rosamond est un sacré personnage que j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir. C’est une femme indépendante, qui a choisi de vivre comme elle l’entendait. Mais c’est aussi quelqu’un qui a du mal à tourner la page après un chagrin d’amour et qui vit beaucoup dans le passé. Quant aux autres, Beatrix et Théa principalement, elles sont mal aimées et aiment mal en retour, elles perdent la tête pour des hommes et négligent leur propre sang. Enfin, Imogen reste assez mystérieuse, on la connaît assez peu.

L’écriture

Dans ce roman, le style de Jonathan Coe est légèrement différent. Il délaisse l’humour pour davantage de gravité. Néanmoins, cela n’est pas trop lourd, il y a beaucoup de douceur, même si elle est teintée d’amertume. Il y a beaucoup de descriptions puisque la narration se base sur des photographies. La plume est belle soignée, c’est toujours un régal.

En quelques mots…

Ainsi, c’est un roman à part dans l’œuvre de Coe, très féminin et si particulier que je n’ai pas le sentiment d’avoir su en parler comme je l’aurais voulu. Il est doté d’une construction très intelligente et d’une belle sensibilité. L’auteur a vraiment su se glisser dans la peau d’un personnage féminin. Si la fin m’a laissée perplexe, c’est une très belle lecture, même si elle ne détrône pas pour moi « Bienvenue au club » qui reste mon favori de l’auteur.

Note : 4,5/5

Stellabloggeuse
 --------

« Beatrix pouvait se montrer très égoïste, c’est incontestable : elle allait me le prouver à maintes reprises pendant des années, des décennies. Mais en même temps, elle était tout à fait capable d’amour. Plus que capable, devrais-je dire : elle était vulnérable à l’amour, voilà le mot, profondément, mortellement vulnérable. Et je crois sincèrement que, durant mon séjour à Warden Farm, elle a fini par m’aimer. A sa façon. »

« Oui, c’est vrai, rien de tout ça n’aurait dû arriver, ce n’est qu’une longue suite d’erreurs terribles, et pourtant regarde à quoi ça a abouti.  Ça a abouti à toi, Imogen ! Et quand je vois le portrait que Ruth a fait de toi, il me paraît évident qu’il fallait que tu existes. Il y a chez toi quelque chose de bon, de juste, de nécessaire. […] la vie ne commence à avoir un sens qu’en admettant que parfois, souvent, toujours, deux idées absolument contradictoires peuvent être vraies en même temps. Tout ce qui a abouti à toi était injuste. Donc, tu n’aurais pas dû naître. Mais tout chez toi est absolument juste : il fallait que tu naisses.

Tu étais inévitable. »

5 commentaires:

  1. Je suis contente que tu l'ais apprécié. Je me souviens de cette gravité et de toute la tendresse. Je me souviens de mon attachement aux personnages et de la qualité d'écriture de Coe, qui rend cette histoire très visuelle par le procédé employé.
    Je me souviens que j'avais trouvé aussi comme toi que Coe rendait à merveille les sentiments féminins.
    Et je suis contente de savoir qu'il me reste plein de romans cet auteur à lire!!! :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Veinarde va, j'avoue que ça me rend triste d'avoir fait le tour de son oeuvre ;) Mais pas tout à fait, il me reste les recueils de nouvelles ! Et oui, j'ai beaucoup apprécié, merci de m'avoir poussée vers ce titre dont le résumé, à la base, ne m'emballait pas.

      Supprimer
  2. Un livre qui donne de plus en plus envie dis donc....

    RépondreSupprimer
  3. C'est tout à fait le genre de livre dans lequel j'ai envie de me plonger en cette période de l'année, je note

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est vrai que c'est un livre qui s'accorde bien à la mélancolie de l'automne

      Supprimer

A vous de donner votre avis, il est le bienvenu !