mardi 9 septembre 2014

La gueule du loup, de Marion Brunet : Madagascar, sublime et dangereuse

[Sarbacane, 2014]

L’année dernière, j’ai découvert Marion Brunet avec son premier roman, « Frangine », qui racontait en toute simplicité le quotidien d’une famille homoparentale. Avec ce nouveau roman qui vient de paraître, elle prend un virage radical et nous propose un thriller initiatique.

Résumé

Bac en poche, Mathilde et Lou s’offrent un voyage à Madagascar, des vacances sensées être paradisiaque. Elles s’installent en bord de mer, mais Lou ne supporte plus les insectes et l’absence d’eau courant. Alors elles partent vers la capitale, Tananarive. Elles en appréhendent le fracas et la pauvreté. Mais une mauvaise rencontre et tout bascule, les forçant à une fuite qui les entraînera au cœur de la forêt tropicale…et plus encore ?

Un thriller initiatique

Ce roman est bel et bien un thriller, il y a des passages haletants où l’on tourne les pages à toute vitesse et où l’angoisse nous serre le ventre. Le danger est là, la violence et le sang également. Les jeunes filles traversent des épreuves terribles. Pas de doute, ce n’est pas un conte de fées, même si l’ogre les poursuit dans la forêt. Mais c’est aussi un roman initiatique, puisque les deux amies sont à l’aube de leur vie d’adulte, l’heure des choix. Si Lou a peur de se tromper, Mathilde a le vertige devant les possibilités qui  s’offrent à elle et voudrait les embrasser toutes. Elle rêve d’autre chose que d’une vie rangée, et ce voyage nourrit cette envie. Les événements mettent à l’épreuve leur amitié et marqueront la fin de leur enfance.

Madagascar, belle et dangereuse

Marion Brunet nous plonge littéralement dans Madagascar, on a l’impression d’y être. L’auteure a vécu sur l’île et la connaît intimement, cela se ressent. Les cinq sens sont sollicités. On voit Madagascar, on la touche, on la hume, on la sent sur notre peau, on en découvre les sons, les chants. On la découvre à la fois sublime, dans sa végétation, ses baleines, ses lagons, mais aussi dangereuse et étouffante, désespérément pauvre mais toujours en mouvement.

Les personnages

J’ai trouvé les personnages de ce roman extrêmement vivants, Lou et Mathilde m’ont vraiment semblé réelles. Je me suis beaucoup retrouvée dans la première, craignant de faire les mauvais choix, refusant de gaspiller le temps qui lui est alloué en erreurs, mais désirant devenir un peu plus audacieuse. Quant à Mathilde, elle fonce, quitte à se cogner à la vie, mais elle découvre ici qu’elle pourrait se brûler les ailes. Autre personnage marquant, la jeune malgache Fanja, qui a une culture très différente, régie par l’honneur et guidée par les esprits.

L’écriture

En ce qui concerne l’écriture, le ton est résolument jeune, dynamique. Le style n’est pas familier, mais direct et spontané, vivant. Il n’est pas très littéraire mais colle très bien à ce que l’auteure veut raconter. Mention spéciale aux descriptions qui font prendre vie à Madagascar nous nos yeux.

En quelques mots…

Ainsi, ce nouveau roman de Marion Brunet est une réussite, entre thriller et roman initiatique. Il est bien mené, les personnages sont vivants et on tremble avec eux. On respire Madagascar, on la goutte, on la hume, on l'aime et on la craint. Un livre que je conseille aux jeunes adultes, et aux grands ados à partir de 16/17 ans.
Merci à Victor et aux éditions Sarbacane pour cette lecture!

Note : 3,5/5
Stellabloggeuse

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« Elle n’a peur de rien, Mathilde, jamais. Elle ne se démonte pas. Elle plonge, elle court, se jette. Dans les vagues, dans la vie, dans les bras des mecs, dans leur lit, dans l’alcool, les plans foireux, l’aventure. Plus c’est casse-gueule et plus elle y va. Lou, ça la rend dingue. »

« Elle s’égare. Son imagination lui souffle des bouts de poèmes exaltés. Sa mère le lui répète assez souvent, pourtant : de la demi-mesure en toute chose, Mathilde ! Et puis quoi encore ? Un demi-bonheur ? Des demi-amis ? Et pourquoi pas une demi-vie tant qu’on y est ? »

« Si Lou chérit cette histoire, c’est parce qu’au fond, elle aurait rêvé d’avoir la même chose que cet homme – mais pour bloquer la bobine… quitte à végéter dans le rien quelques temps. Juste cesser de sentir la course folle du temps lui grignoter la vie. C’est pour ça qu’elle a toujours peur de se planter, de faire les mauvais choix, et de regretter. Du coup, parfois elle ne vit pas. Pas comme Mathilde et ses mille vies en une seule, toujours à galoper au-devant du fil. »

2 commentaires:

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