lundi 29 avril 2013

Sur la tête de l’amour, de Boris Lanneau : une histoire d’amour urbaine

[Sarbacane, mars 2013]

Je l’avoue, lorsque j’ai reçu ce roman de Boris Lanneau, ma première pensée a été « encore un roman qui se passe dans une cité, encore du slam ». Et il est vrai que ce type de romans est l’un des piliers de la collection eXprim’. Néanmoins, celui-ci, sorti au début du mois de mars, a bien son identité propre et vaut la peine d’être lu.

Résumé

Aswad est en quelque sorte la star de la cité. A la MJC du quartier, il déchaîne les foules avec ses performances. Dans l’ombre, œuvre Sam. C’est lui qui écrit les textes d’Aswad, sans que personne ne le sache, il deale des rimes. Sam et une énigme dans le quartier, personne ne l’a jamais entendu prononcer une parole, mais il a su imposer le respect. Tous deux ont un point commun : la belle Nora qui fait battre leur cœur. Une élève brillante qui a tout pour réussir, mais handicapée par un problème d’orthographe et de grammaire.

Un conte moderne

Ce roman nous montre un autre visage des cités. En nous plongeant dans la vie de trois jeunes habitants des barres d’immeuble, il dédramatise le quotidien et nous offre une sorte de conte moderne. Car, il arrive des miracles dans ces immeubles, comme ce belge qui chante du Johnny Hallyday sur son balcon, accompagné par ses voisins. On rit aussi, dans ce quartier, avec les deux débrouillards Hein & Neken. Mais surtout, on aime. L’auteur nous offre ainsi une romance qui a de faux airs de Cyrano de Bergerac, revu et corrigé. Une histoire positive…jusqu’à cette fin, qui tombe comme un couperet et m’a laissée un brin perplexe.

Un roman qui joue avec les mots

Les mots sont au cœur de ce roman. Ceux que Nora n’arrive pas à écrire correctement, alors qu’elle est brillante, et qui font naître en elle un sentiment de honte. Ceux qu’Aswad sait déclamer, mais qu’il est incapable d’écrire lui-même. Ceux que Sam sait si bien manier, mais qu’il refuse de dire. Le roman est parsemé de textes poétiques, d’extraits de slam, de jeux de mots.

Les personnages

Les personnages de ce roman sont attachants dans leur ensemble. Aswad, s’il a tendance à tricher et à faire le fier, est un bon garçon, au fond. Sam est touchant, avec ses silences, sa plume aiguisée et sa manière timide d’aimer. Il en est de même pour Nora et ses doutes, ainsi que son frère avec lequel elle partage une jolie complicité, même si ce dernier a parfois la tentation de jouer le « grand frère » protecteur. On aimerait qu’ils s’en sortent, qu’ils soient heureux, voilà pourquoi j’ai eu du mal avec la fin du roman qui nous oblige à les abandonner de manière assez brutale.

L’écriture

Ce roman est écrit dans une belle langue orale, pas tout à fait aussi jolie que celle d’Insa Sané, mais dans la même lignée. Le slam, ce sont des mots du quotidien agencés de telle façon qu’ils forment une poésie. Pas une poésie d’élite, une poésie à la portée de tous. Et c’est bon, d’être ainsi porté par les mots. A tel point que cela peut nous faire apprécier un roman dont, à priori, le sujet ne nous intéressait pas plus que cela.

En quelques mots…

Ainsi, c’est un roman que j’ai apprécié, un joli conte moderne dans le décor de la cité, avec des personnages attachants et des mots sensibles et percutants. J’aurais juste aimé que l’on nous emmène un peu plus loin, que la fin ne soit pas si abrupte. Elle nous fait revenir sur terre un peu brutalement, après avoir rêvé d’amour…
Je vous laisse découvrir l'avis de Batifolire et Le Combat oculaire qui ont beaucoup aimé eux aussi.
Merci aux éditions Sarbacane et à la collection eXprim’ pour leur confiance.


Note : 3,5/5

Stellabloggeuse

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Ce roman fait partie des challenges :


Challenge « Où sont les hommes ? » : lecture n°41


Challenge « Bouge ta PAL ! » : lecture n°35

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"Nora se plante les pouces sur les tempes, les yeux sous l'abat-jour de ses deux mains. Elle pense au passé, à l'école primaire, quand tout allait bien parce que tu ne te rendais pas compte. Le rouge de la correction, c'est le mercurochrome des mots, disait Madame Brouard, la maîtresse de CE2. Nora parcourt sa copie, tout ce rouge qui coule entre les lignes sous les majuscules majestueuses, les lettres rondes, et elle pense brusquement que quand elle écrit elle écorche les mots, elle les fait saigner, comme un genou sur le goudron, comme une langue coupée aux ciseaux."

"Oh, il regarde Nora, des boucles et des bretelles. Sort les mains de ses manches... pour mieux les fourrer dans ses poches pleines d'encre. Tous deux ne savent plus où se mettre, Sam creuse un puits de pétrole au fond de ses poches et Nora fait jouer à ses dix doigts une valse à pleins tubes entre la hanse de son sac et sa mèche de cheveux - son bras fait tout pour cacher le jaune et le noir de son livre. Sam remarque sa gêne. Quel "nul" a-t-elle bien pu prendre, elle qu'on dit si brillante, si douée, qui réussit tout ce qu'elle approche ?"

2 commentaires:

  1. Je suis impressionné ! Tu as un talent de résumer les livres. Je n’aurai pas aussi bien dit les choses ^^

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    1. Merci, c'est très gentil à toi. Tu as lu ce livre ? Tu as aimé ?

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