[Presses de la cité, 2011]
Voici un roman que je brûlais de lire depuis de nombreuses semaines ! La faute à cette chère Cajou qui avait écrit un billet plein d’enthousiasme sur ce roman intitulé « La maîtresse de Rome », écrit par l’américaine Kate Quinn. Aussi, quand j’ai eu la chance de le trouver d’occasion, j’ai immédiatement succombé, et il m’a fallu attendre l’été pour pouvoir le déguster à ma guise…
Résumé
Thea est une jeune esclave juive de quatorze ans. Enlevée à son pays conquis par l’empereur romain Titus, elle est désormais au service d’une jeune romaine très ambitieuse, Lepida Pollia. Cette dernière est la fille de l’organisateur des Jeux de Rome au sein de l’amphithéâtre flavien (plus connu sous le nom de Colisée). Alors qu’elles assistent aux Jeux, elles vont croiser la route d’Arius le Barbare, un gladiateur qui n’a jamais voulu tuer mais dont l’instinct de survie, plus puissant que tout, le pousse à massacrer tous ses adversaires. C’est le point de départ d’une aventure palpitante, qui va les mener toutes deux dans l'entourage de l'empereur Domitien.
Une plongée dans la Rome antique
La première chose que l’on peut dire sur ce roman, c’est qu’il vous plonge tout de suite dans le décor de la Rome antique, à la fin du premier siècle de notre ère. Rome avec ses domusorganisées autour d’une cour (l’atrium) et les repas pris sur des lits dans la salle de réception (le triclinium), les Jeux de l’amphithéâtre flavien, les discussions sur le forum, les cohortes prétoriennes, les séances du Sénat…
Le lecteur est très vite immergé dans ce monde (personnellement cela m’a rappelé avec délices mes cours de civilisation latine), jusqu’à avoir l’impression d’être un acteur de cette histoire. Un vrai voyage dans le temps, qui prend corps grâce à des détails très bien intégrés au récit. L’auteur, fille d’historien, est très bien documentée. En tant qu’amoureuse de cette ville et étudiante en histoire, j’ai totalement succombé.
Une intrigue passionnante et une belle romance
En dehors du cadre de ce roman, j’ai rapidement été happée par l’intrigue, véritablement palpitante. On ne s’ennuie pas, les évènements se succèdent, et on se sent très rapidement concerné par le devenir des personnages. L’histoire se déroule sur une quinzaine d’années, le lecteur suit ainsi des destins qui se mêlent à de grands évènements historiques.
Ce roman historique mêle ainsi des intrigues personnelles dont Lepida Pollia essaie de tirer les ficelles, des intrigues politiques liées à la maîtrise du pouvoir à Rome, des combats de gladiateurs, des soirées de fête, des guerres dans les provinces, des exécutions et des meurtres, et surtout, une très belle histoire d’amour. Une histoire qui réussit à éviter les clichés, qui n’a rien de simple, et à laquelle j’ai totalement adhéré.
J’ai seulement été un peu déçue par la fin du roman, un peu trop simple à mon goût, alors que j’attendais un final à couper le souffle. Globalement, j’ai ressenti moins d’émotions sur la fin, alors que j’ai été très touchée par les deux premiers tiers du livre. En fait, j’étais un peu trop certaine du destin de nos personnages, ce qui m’a ôté un peu de tension… Mais je chipote, c’est un tout petit bémol !
Une galerie de personnages forts
Les personnages sont l’un des points forts de ce roman. Kate Quinn nous en présente ainsi toute une galerie, et entre alternativement dans la tête de trois d’entre eux : Thea, Lepida et Arius.
Thea est une jeune femme admirable, à la fois très forte et fragile, empreinte de la culpabilité de son passé, indépendante d’esprit jusqu’à l’insolence, et chanteuse de talent. J’ai suivi avec passion son destin exceptionnel, me préoccupant réellement de son devenir. Vient ensuite Lepida, qui est pratiquement son antithèse : elle est très belle et mise tout là-dessus, jouant de son corps et ne renonçant à aucune manipulation pour satisfaire ses désirs. Elle ne s’inquiète que d’elle-même et n’a aucune conscience des sentiments d’autrui, qu’elle n’hésite pas à écraser (y compris sa propre fille). C’est un personnage que le lecteur adore détesté, et j’ai pris beaucoup de plaisir à voir les évènements lui échapper peu à peu…
Quant à Arius, c’est un personnage complexe et touchant. Gladiateur, il se débat entre des instincts de mort et des aspirations beaucoup plus paisibles. Ayant tout perdu, il est dangereux, car il n’a plus de limite et ne craint pas pour sa vie. Pourtant, il est encore capable d’aimer, et c’est un grand plaisir d’assister à cela.
Les personnages secondaires sont tout aussi intéressants. Certains sont attachants comme Vix, le gamin intrépide et impertinent, Dame Flavie qui sauve des enfants, Julie et sa dévotion pour la déesse Vesta, Paulinus qui essaie d’être un homme droit sans y parvenir tout à fait… Quant à l’empereur Domitien, il est très complexe, à la fois brillant et cruel, puissant mais révolté contre sa condition de mortel, jouant avec la peur qu’il inspire aux autres. Difficile de l’apprécier, on apprend à le craindre, mais il est captivant.
Le style
J’ai beaucoup aimé la manière dont Kate Quinn a conté cette histoire. Son style simple et efficace permet de faire avancer l’intrigue à un rythme soutenu. Elle a su allier avec grand talent la réalité historique et des éléments d’invention. Il y a aussi de l'humour, notamment au travers du personnage de Vix. Mais surtout, Kate Quinn maîtrise complètement la narration de son histoire, elle ne perd jamais le fil, et le lecteur est tenu en haleine tout au long de la lecture.
En quelques mots…
J’ai été très bavarde, plus encore que d’habitude… En résumé, je ne peux que vous conseiller de lire ce roman historique maîtrisé et passionnant qui allie les destins personnels de personnages forts et de grands évènement historiques. Il vous plongera dans la Rome antique du premier siècle, pour une évasion garantie. Si j’ai été un tout petit peu déçue par la fin, je me suis tant régalée tout au long du roman que je ne peux que lui donner un coup de cœur… Et attendre la suite avec beaucoup d’impatience !
Note : 5/5 (Coup de cœur)
Stellabloggeuse
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« Il revit la mort de l’amazone, elle avait pris la forme de Thea, et il faillit lui dire de s’en aller, de s’enfuir très vite, avant qu’il ne la tue elle aussi… Alors, elle se pencha vers lui, appuya la joue contre sa gorge, posa un baiser sur la veine qui battait derrière son oreille, et l’arène disparut, emportant le sang avec elle. Il lui saisit la main, la serra sauvagement. En sentant ses os craquer, il se rappela qu’il devait être doux. Il ne l’avait jamais été, avec personne. […] Il l’embrassa au creux de l’épaule, suivit des mains les courbes lisses de sa poitrine, l’arc flexible de son dos, et la sensation qui monta à sa gorge lui était si étrangère qu’il mit un moment à l’identifier comme le bonheur… Elle avait la peau douce et chaude, et il aurait voulu ne plus jamais toucher la poignée d’une épée. »
« L’amphithéâtre tout entier se dressa, et je criai avec les autres. Il fut un temps où j’aurais éprouvé de la pitié pour ces espagnols, qui tenaient à la vie tout autant qu’Arius. Mais l’amour m’avait rendue cruelle et je souhaitais seulement leur mort. D’un seul coup, Arius trancha au coude le bras droit de l’un d’eux et, malgré ma terreur, son adresse m’emplit d’une fierté farouche.
Il tournoyait sur ce minuscule carré où il ne pouvait pas se déplacer de plus de deux pieds, mais où il abattait sans relâche son épée de quatre côtés à la fois. Les spectateurs se rasseyaient peu à peu pour prendre des paris, car les enjeux baissaient. Et puis, au moment où je recommençais à respirer, la chose arriva. Il s’en fallut de presque rien. Il recula légèrement pour esquiver l’assaut brutal d’une lame courbe. Un court instant, il perdit l’équilibre. Il vacilla.
Il tomba. »
« J’aime en toi la noirceur qui veut tuer tout le monde entier, et la douceur qui le regrette ensuite. J’aime ta façon de rire, comme si tu t’étonnais simplement de pouvoir le faire.»
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Ce roman fait partie des challenges :
Challenge ABC 2012 : 18/26
Et je dois dire à ce sujet qu’Arius a un gros potentiel de « prince charmant » ! Pas un prince charmant riche, mais un homme qui se bat avec toute sa rage pour ceux qu’il aime…