samedi 31 mars 2012

Elvire & Jeremy, de Pierre de Vilno : un amour très contrarié

[Héloïse d’Ormesson, août 2011]

Le Festival du Premier Roman de Chambéry vous fait parfois faire de drôles de découvertes ! Cela a été le cas avec « Elvire et Jérémy » de Pierre de Vilno.

En effet, dans ce roman, l’auteur met en scène deux personnages, qui préfèrent chacun les membres de leur sexe. Elvire a une relation stable avec Daphné, tandis que Jérémy multiplie les conquêtes d’un soir avec des garçons rencontrés sur Internet. Un beau jour, ils se rencontrent : Elvire suit des études de droit, Jérémy donne quelques cours alors qu’il termine sa thèse. Ils sont alors fortement et irrémédiablement attirés l’un par l’autre.

Passée la surprise face à cette histoire, j’ai commencé le roman, et je dois dire que je suis vite entrée dedans. Le style de l’auteur, très agréable, n’y est pas pour rien. De même, l’histoire se tient : nous avons certes affaire à un « coup de foudre », mais rien n’est simple : Elvire est en couple, et tous deux restent attirés par le même sexe. Ils se fuient autant qu’ils se cherchent. Tous deux se posent beaucoup de questions, sur eux-mêmes, sur l’amour, le couple. Car avant toute chose, Elvire et Jérémy sont épris de liberté. Quelques scènes érotiques, bien écrites et bien placées, relèvent le tout. Le résultat, c’est qu’en tant que lecteur, on y croit à cette histoire improbable, et on se demande comment cela va finir.

Et c’est là que les choses se gâtent un peu. Au fil de pages, le roman devient un peu répétitif, les mêmes questionnements reviennent. Mais surtout, les personnages versent beaucoup de larmes. Un peu de sensibilité, c’est bien, des larmes toutes les dix pages, c’est trop, et j’avoue avoir été un peu lassée. Enfin, en tant que grande curieuse, la fin du roman m’a laissée un peu sur ma faim : elle n’est pas tranchée, comme si l’auteur n’avait pas su comment conclure.

Il n’en reste pas moins que c’est un bon roman, fluide, et avec des personnages ayant une psychologie intéressante, auquel il peut être bon de donner sa chance !

Note : 3/5

Stellabloggeuse

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"Certainement, elle voudrait aller plus loin, quitte à nager jusqu’au fond. Certainement, elle aimerait partir à la conquête de son univers à lui, oui celui qui propose. Car finalement elle ne sait rien de lui. Et puis, elle voudrait rester là. Dans son monde à elle, qui lui plaît, qu’elle aime, celui dans lequel elle a entraîné Daphné. […] Faut-il trancher ? Faut-il décider ? Jeremy. Daphné. Jour. Nuit. Blanc. Noir. Comme si un ordre moral incarné venait les séparer, tous les deux. […] Le sentiment est-il sexué, lui ? La passion aussi ? Ou peut-elle naître tranquillement-merce-est-ce-qu’on-peut-nous-foutre-la-paix-deux-minutes-s’il-vous-plaît ?"

vendredi 30 mars 2012

Concours "Je partage mes coups de coeur" - RESULTATS

Coucou à tous !

Voici le moment tant attendu (par moi comme par vous, cela a été difficile de patienter toute la journée alors que je connaissais le nom des gagnants depuis ce matin !), celui des résultats du concours "Je partage mes coups de coeur" !

Tout d'abord, merci à vous...
Vous avez été 27 en tout à participer
Et pendant la durée du concours le blog a continué à vivre et à progresser. Merci d'être là :)

Merci aussi d'avoir proposé vos coups de coeur, vous m'avez tous cité un livre différent, aucun doublon ! J'en connaissais assez peu, donc je saurai où piocher pour de futures découvertes...

J'ai effectué le tirage au sort avec ce merveilleux petit logiciel gratuit, "The hat". C'est tellement mieux que le fichier Excel de la dernière fois...^^

J'ai fait un tirage au sort pour chaque lot, avec les participants du dit lot. Si un même nom était sorti deux fois, je lui aurais attribué un lot selon les priorités que la personne m'avait données. Mais ce n'est pas arrivé.

Allez, voici les gagnants :

Lot n°1 - La délicatesse de David Foenkinos


Maureen D. (Bazar de la littérature)
Il y a eu 11 participants pour ce lot

Lot n°2


Vanessa G. (Le jardin de Natiora) qui a choisi Fourrure d'Adélaïde de Clermont-Tonnerre
Il y a eu 20 participants pour ce lot, tous titres confondus

Lot n°3 - Les Déchaînés (offert par Sarbacane et dédicacé par Flo Jallier)


Clara L. (Morgana - D'encre et de Rêve)
Il y a eu 20 participants pour ce lot, ce qui m'a ravie

Voilà, je suis à la fois ravie (car les gagnantes me sont familières, que ce soit sur le blog ou sur la page) et frustrée, car j'aimerais bien faire plaisir à chacun d'entre vous... Une prochaine fois sans doute ?

Les filles, les lots partiront en début de semaine prochaine :)

Je vous embrasse tous,
A très vite,

Stellabloggeuse

samedi 24 mars 2012

Le passé continu, de Neel Mukherjee : roman d’apprentissage désenchanté entre Calcutta et Londres

[JC Lattès, mars 2012]

Me voici avec un nouveau roman évoquant l’Inde ! En effet, ce n’est pas la première fois que je « croise » ce pays dans un roman cette année. Après le romanesque de « Rani », me voici avec une toute autre vision, bien plus désenchantée. Mais avant d’en venir au fait, je tiens à remercier Livraddict et l’éditeur JC Lattès, grâce auxquels j’ai obtenu ce titre en partenariat.

Résumé

« Le passé continu » est le premier roman de Neel Mukherjee, âgé de 39 ans et vivant à Londres. Il nous présente Ritwik, un jeune indien d’une vingtaine d’année, qui a grandi dans une maison trop petite, peuplée de ses parents et son petit frère, ses oncles dépourvus d’emploi, et sa grand-mère qui se plaît à dresser les membres de la famille les uns contre les autres. L’histoire commence avec la mort de ses parents, à quelques jours d’intervalle. Ritwik choisit alors de s’envoler pour l’Angleterre, et de commencer une nouvelle vie. Mais l’adaptation n’est pas facile, et nous voyons évoluer Ritwik sous nos yeux tout au long de ce roman, dans lequel on nous raconte également quelques-uns de ses souvenirs.

Mon avis

La première chose qui me vient à l’esprit pour vous parler de ce roman, c’est qu’il vous fait réellement voyager, tant géographiquement que culturellement. Le lecteur est confronté à une Inde inconnue, loin des clichés de Bollywood. Pendant les épisodes du roman se déroulant en Inde, on ressent une atmosphère bien particulière. L’auteur évoque les ravages de la mousson, les bruits, les plats, les vêtements, avec une profusion de vocabulaire indien bien expliqué grâce à des notes de traduction.

Mais, dans les souvenirs de Ritwik, on ressent surtout avec une grande violence la menace de la pauvreté ordinaire, qui, selon l’auteur, ne préoccupe pas autant l’Occident que celle de l’Afrique. Cette pauvreté qui pousse les habitants à s’entasser dans de petites maisons, et à faire d’une bonne éducation leur planche de salut. Ils sont prêts à tout dans l’espoir d’une vie meilleure, comme nous le voyons avec la mère de Ritwik, proprement effrayante. Le lecteur n’est pas épargné par ce récit assez dur, mais édifiant. J’ai apprécié cette vision de l’Inde, sans détour.

Par le biais d’un roman rédigé par le narrateur, Neel Mukherjee nous présente l’histoire coloniale de l’Inde, et notamment de la province du Bengale sous la domination anglaise. Il montre notamment quels mécanismes, quel évènement ont fini par creuser un fossé entre hindous et musulmans. J’ai particulièrement aimé ces récits dans le récit, qui constituent au passage mise en abîme plutôt réussie.

Le reste de l’action se situe en Angleterre, et le lecteur voit alors Ritwik se débattre entre ses origines, les personnes qui le voient comme un étranger, sa sexualité, la difficulté de se construire une existence. Il croise d’autres misères que la sienne. Il est difficile pour lui de se faire une place sur cette terre étrangère. Il fait pourtant un petit bout de chemin. J’ai aimé ce personnage assez complexe, pris entre plusieurs aspirations, entre son passé et ses désirs. Ritwik est également d’une naïveté assez attachante. Foncièrement bon, il se pose beaucoup de questions et est souvent étonné par les comportements humains.

Puisque nous parlons des personnages, je peux vous dire que j’ai beaucoup aimé Anne Cameron, une vieille dame dont Ritwik s’occupe en échange d’un toit. Leur relation, parfois drôle, est assez touchante, pleine de sobriété, et j’ai aimé ce personnage oscillant entre une surprenante lucidité et l’égarement de la vieillesse. Elle permet également à l’auteur d’évoquer la solidarité entre générations, si importante en Inde et appliquée en Angleterre par Ritwik.

En ce qui concerne le style d’écriture à proprement parler, il est fluide et agréable. L’auteur alterne une plume romanesque (lors des récits sur l’Inde coloniale) et des phrases plus dure et directes. Son écriture est bien travaillée, mais sans fioritures inutiles.

J’ai trouvé le rythme de ce roman assez lent au départ, mais plus j’avançais dans ma lecture et moins j’arrivais à le laisser de côté. Attachée à Ritwik et entraînée par les évènements, j’ai été emportée, même si ma sensibilité a parfois été malmenée par des scènes violentes et crues.

Mon principal regret, néanmoins, c’est la manière dont se termine le roman. J’ai trouvé cette fin trop brutale, et je n’ai pas compris la réaction de Ritwik. Cette fin abrupte m’a posé problème, je me suis demandé quelle en était la finalité. Avec un peu de recul, je pense que l’auteur a voulu mettre en garde les peuples des pays en développement contre leurs propres divisions, qui les affaiblissent face à l’Occident, qui amoindrit leurs chances de survie. Néanmoins, j’avoue que j’aurais bien aimé une fin plus développée.

Mais si vous vous intéressez à l’Inde, aux différences culturelles, ou simplement à la difficulté de trouver sa place dans la société d’aujourd’hui, je vous invite à lire ce roman, même s’il vaut faudra encaisser la dureté de cette histoire. Ce roman a une force indéniable, j’ai été remuée. Cette chronique est un peu longue, mais je voulais essayer de vous compte du mieux possible des multiples aspects de ce roman (merci d’avoir lu jusqu’au bout !). Merci encore à Livraddict et JC Lattès pour cette découverte.

Note : 3,5/5

Stellabloggeuse 
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Je n’ai pas réussi à choisir entre ces trois citations :

« Le sourire de Robert s’illumine. Il enchaîne des sortes d’exclamations hachées.
-Wahou. Super. Génial. J’aime l’Inde. […] C’est d’un tel exotisme, non ? Avec cette nature encore sauvage. Tout ce trip mystique, un pays qui baigne à ce point dans la spiritualité, c’est fascinant, non ?
Ritwik lui décoche un sourire meurtrier. Il a envie de dire : « T’as raison. En rayon, on a aussi des fakirs nus, des éléphants blancs et des tigres rayés qui courent dans les rues de Dehli », mais il se retient. »

« Ritwik était la cible privilégiée de toutes ces énergies refoulées. La raison en était simple : il était l’aîné, il devait donc être sans défaut pour qu’Aritra puisse suivre son exemple et marcher sur ses pas. […] Il serait sa création, son jardin privé et primé, son fils parfait. Son rempart contre tout ce que la vie avait érigé contre elle. « Je le plierai, le forgerai, le battrai comme le fer sur l’enclume, le modèlerait comme de la cire, de l’argile, il sera une pâte molle entre mes mains, il est à moi, mon amour le bâtira de neuf, je leur montrerai que j’ai gagné, la graine n’exsude son huile que quand on l’écrase, je saurai extraire cette huile de son être pour que sa vie ait de l’éclat, qu’elle ne garde pas l’aspect terne de la graine intacte, et c’est à moi qu’il devra d’être brillant. »

« Mais n’a-t-on pas le droit de tourner le dos au malheur, de suivre un autre chemin que celui qui vous mène à une impasse ? Je voudrai pouvoir prendre un nouveau départ, dans un nouveau lieu, avec des gens nouveaux. Est-ce si inconcevable ? »

mercredi 21 mars 2012

Les Dames du Lac, de Marion Zimmer Bradley : la légende arthurienne vue par les femmes


Moi qui ne suis pas une grande connaisseuse de la légende d’Arthur et des chevaliers de la Table Ronde (je dois avouer que cela se limite au dessin animé de Walt Disney et à la série de M6…on ne se moque pas s’il vous plaît^^). En tant qu’historienne, j’ai un peu honte… Quoi qu’il en soit, cela faisait un moment que ce livre m’attirait, et à l’occasion d’un Book Club organisé à son sujet sur Livraddict (nous nous retrouverons ce soir à 18 heures sur le forum pour discuter de ce roman), je me suis lancée !

Marion Zimmer Bradley nous présente la Grande Bretagne du très haut Moyen-Age, en des temps obscurs où l’histoire est presque entièrement constituée de légendes. La Grande Bretagne est menacée par les Barbares saxons qui cherchent à l’envahir. Les habitants des terres de Grande Bretagne, de leur côté, sont divisés, entre païens fidèles à la déesse d’Avalon, et chrétien converti par les romains. En Avalon, Viviane, la dame du lac, et Merlin l’enchanteur, tentent de trouver une solution pour unifier la Grande Bretagne. Cet espoir d’unité réside dans Arthur, issu de l’union d’une dame d’Avalon et d’un grand seigneur romanisé.

Le côté très intéressant dans ce roman, c’est de mettre les femmes au premier plan. Nous suivons tour à tour Viviane, sa sœur Ygerne (la mère d’Arthur), Morgane la fée (fille d’Ygerne et de son premier mari) et Guenièvre, l’épouse du roi. Il est agréable de les voir mener la danse, et souvent parvenir à faire plier des hommes qui sont pourtant des rois.

Mais cela m’amène à un aspect du roman qui m’a moins plu : j’ai trouvé les personnages assez versatiles dans l’ensemble. Je pense à Ygerne, d’abord révoltée contre le destin qui lui est dévolu, puis qui l’embrasse avec ardeur après avoir fait un simple rêve. Je pense à Lancelot, attirant Morgane dans ses bras puis l’oubliant en moins d’une seconde lorsque Guenièvre entre dans sa vie. Je pense à Arthur, qui a prêté serment à Avalon et qui le renie sur un simple désir de son épouse. Enfin, je pense à Guenièvre, chrétienne convaincue qui accepte pourtant Morgane parmi ses dames d’honneurs, et qui la supplie de lui fournir un charme pour enfanter.

Toujours du côté des points faibles, j’ai également trouvé ce livre un peu lent, assez contemplatif. On assiste à des mariages, des agonies et des décès, des couronnements, et surtout, à des pages et des pages de débats intérieurs des personnages, tiraillés entre deux religions. Je dois avouer que j’attendais tout de même de ce roman un petit côté « épopée », et qu’il n’en était rien.

Voilà deux paragraphes que j’émets des critiques envers ce roman, et pourtant je l’ai aimé. J’ai beaucoup apprécié la plume de Marion Zimmer, très agréable à suivre. Elle nous emmène avec agilité dans les paysages d’Avalon et du monde des chrétiens, elle fait ressortir les émotions de ses personnages (même si elle en fait parfois un peu trop dans le sentiment amoureux), elle démêle les intrigues politico-religieuses qui animent ce petit monde.

Et, au final, Marion Zimmer nous emmène dans son univers. On prend plaisir à voir cette légende très masculine réinterprétée au travers du regard des femmes.

Note : 3/5 
Stellabloggeuse 
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Ce roman fait partie des challenges :


 Challenge ABC 2012 : 9/26

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« Non, ce n’était pas un rêve ; leurs mains, leurs coeurs, leurs bouches avaient dit vrai. Ils s’étaient retrouvés au Pays de toute vérité, au Pays des âmes, unis non par un songe éphémère, mais de toute éternité, par-delà un très ancien souvenir. »

« Mon enfant, vous devez vous rappeler que cette terre appartient à tous ses habitants, quels que soient leurs dieux. Nous combattons, tous ensemble, contre les saxons, non parce qu’ils n’adorent pas nos divinités, mais parce qu’ils veulent brûler nos foyers, dévaster nos champs, s’approprier nos biens. Nous nous battons pour défendre la paix sur cette terre, chrétiens et païens unis dans une même volonté. C’est la raison, la seule, pour laquelle tant d’hommes sont venus rejoindre Arthur. »

samedi 17 mars 2012

Papa was not a Rolling Stone, de Sylvie Ohayon : chronique rock n’ roll d’une famille juive tunisienne


Aujourd’hui, nous allons sortir un peu de notre province (enfin, je parle pour moi bien entendu), et nous intéresser au destin d’une famille tunisienne émigrée en France au milieu du siècle, et installée dans la cité des 4 000 à La Courneuve. En effet, Sylvie Ohayon nous livre une biographie romancée dans laquelle elle nous dépeint peu à peu cette famille.

Elle commence par nous présenter ses deux grands-parents, Marguerite et Moïse. Ils se sont rencontrés sur les plages de Tunisie, puis sont partis pour la France qui avait besoin de leur force de travail. Ils ont eu beaucoup d’enfants, dont l’aînée, Micheline. Celle-ci, par sa trop grande naïveté, tombe enceinte alors qu’elle est encore très jeune, et accouche de la petite Sylvie. Cette dernière nous raconte alors ce qu’a été sa vie par petites touches, alternant des récits de son enfance avec ceux de sa vie d’adulte. Elle nous présente son combat pour se construire un avenir, pour tracer son chemin dans la vie qui ne lui a pas épargné un certain nombre de drames.

Et c’est là l’une des grandes qualités de ce livre : l’auteur nous raconte les drames de sa vie, parfois très durs, et pourtant le récit n’est jamais pesant tant elle évoque les choses avec un recul teinté d’humour. Un humour parfois grinçant, tendant parfois à l’humour noir, mais efficace. J’ai adhéré.

Quant aux personnages, ils sont attachants : Moïse et son sens de l’honneur, sa manière d’aimer sans jamais énoncer ses sentiments ; Margot et sa force incroyable, son optimisme à toute épreuve ; les garçons de la cité, capables du pires, mais toujours prêts à défendre une fille de leur milieu. Il y a aussi les personnages que l’on adore détester, comme Daniel, le beau-père de Sylvie. Enfin, Micheline est un personnage ambigü, qui a du mal à assumer son rôle de mère, qui refuse d’éprouver des sentiments, mais qui n’est pourtant pas si indifférente que cela.

Ainsi, c’est une histoire pleine de personnages, une histoire de famille, et l’on s’attache assez rapidement à cette dernière. Mais c’est aussi une histoire de courage, Sylvie s’étant battue à la fois contre son entourage qui souhaitait qu’elle reste « dans le moule » et contre les préjugés des milieux plus aisés vers lesquels elle se dirigeait.

Il y a ainsi quelque chose de très positif dans ce livre, l’idée qu’il ne faut jamais abandonner. Elle ne donne pas pour autant une vision idyllique de l’ascension sociale, montrant les obstacles à franchir et le malaise ressenti dans son nouvel univers. Et c’est cette nuance qui est particulièrement intéressante.

Dans ce roman autobiographique, l’auteur fait une sorte de bilan des quarante premières années de sa vie, avec beaucoup de recul. Elle nous livre ainsi des réflexions intéressantes sur ses origines, sur la pauvreté de son enfance qu’elle voit d’un œil positif, sur la futilité de certaines préoccupations.

Il y a beaucoup de matière, c’est un roman très dense, qui fait réfléchir, même si au bout d’un moment, l’auteur se répète peut-être un peu sur certaines choses. Mais globalement, la légèreté du ton, l’humour de l’auteur, permettent de faire passer toutes ces réflexions au lecteur tout en lui faisant passer un bon moment.

Ainsi, c’est un premier livre assurément réussi pour l’auteur, tant par son style direct et son humour grinçant que par la multitude des thèmes évoqués, avec le recul d’une vie bien remplie.

Note : 3,5/5 

Stellabloggeuse 

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« Je suis là, lasse, seule entre les murs immenses d’un appartement trop grand et mon enfance manque, la pauvreté de mon enfance qui était mienne me fait défaut parfois et je pense à la folie de ce monde de cons lorsque chez Chanel, je vois un bracelet en plastique à neuf cent vingt euros. J’ai voulu être de la fête, et maintenant que j’ai vu, je comprends que la vraie misère c’est de vivre à l’envers de la raison, de continuer à jouir de bêtises qui vous laissent le sentiment de n’être rien quand vous avez terminé de posséder les choses et des relations inutiles. »

« Il faut que je vous parle de mes souvenirs aussi. Il faut que je vous raconte comment tout cela est arrivé et pourquoi c’est bien aussi d’avoir connu des drames. Ça relève le goût de la vie, comme le poivre fait s’épanouir les saveurs d’un plat alors que le poivre, en soi, c’est dégueulasse et que ça fait pleurer. »

jeudi 15 mars 2012

Concours « Je partage mes coups de cœur » ! TERMINE

* Ce concours est maintenant terminé, merci d'avoir participé *

Un peu moins de trois mois après mon concours d’anniversaire, nous avons de nouveau un certain nombre de choses à fêter, mes amis !

En effet, durant ces quelques mois, le blog a franchi les 10 000 visites depuis sa création et compte plus de 450 commentaires. Quant à la page Facebook du blog, elle a atteint le seuil symbolique de 100 fans. Me voilà donc pleine de gratitude à votre égard, et je voudrais vous remercier comme il se doit !

Mais la principale raison qui me pousse à vous proposer ce concours, c’est l’envie de vous faire partager certains livres que j’ai aimés…

Ce sera donc un concours sur le thème « Je partage mes coups de cœur » !

Il sera composé de trois lots :

Lot n°1 :



La Délicatesse, de David Foenkinos (mon avis)
Un livre qui m’a touchée récemment, même s’il n’a pas été un coup de cœur à proprement parler.

Lot n°2 :

  Pour ce lot, vous aurez le choix entre deux cadeaux :


Fourrure, d’Adélaïde de Clermont-Tonnerre (mon avis)
Mon coup de cœur de l’année 2010, et l’un de mes premiers billets sur le blog.

 ou

Un livre de Pierre Bottero, au choix (à condition qu’il soit sorti en poche)
Un auteur que j’ai découvert sur le tard, grâce à mes blogocopines préférées, et dont j’ai maintenant l’intention de dévorer la bibliographie !

Lot n°3 :


Les Déchaînés de Flo Jallier (mon avis)
Un livre qui me tient vraiment à cœur, mon préféré en 2011.
Ce livre vous est offert par les Editions Sarbacane et l’équipe de la collection eXprim’, un grand merci à eux !
Etant donné que Flo Jallier se rend au Printemps du Livre de Grenoble le 30 mars, je devrais être en mesure de faire dédicacer le livre pour le gagnant, si elle n'est pas trop pressée par le temps.


J’espère que cela vous plaît et vous fait envie ! Voici maintenant les conditions de participation :
  
Le concours est désormais terminé
  
J’espère que tout est clair et que je n’ai rien oublié, je vous souhaite maintenant bonne chance à tous !
Et merci de faire vivre Des Romans entre deux mondes…
Je vous embrasse bien fort,

Stellabloggeuse

samedi 10 mars 2012

Comment sauver un vampire amoureux, de Beth Fantaskey : un excellent moment à passer dans un palais de vampires, entre tension et légèreté

[Le Masque, décembre 2011]

*Attention, ceci est le tome 2 d’une série, risque de spoilers sur le tome précédent*

Voilà une « suite » que j’attendais avec impatience tout autant que je le redoutais. En effet, j’avais pris beaucoup de plaisir à lire « Comment se débarrasser d’un vampire amoureux », et j’étais plutôt curieuse de découvrir Jessica dans son rôle de vampire. Mais en même temps, j’appréhendais car je me demandais si j’allais retrouver la fraîcheur et l’humour qui m’avaient séduite à la lecture du premier tome. Finalement, je n’ai pas résisté lorsque je l’ai vu en librairie, et l’organisation d’une Lecture Commune par Lizi sur Livraddict m’a poussée à le lire maintenant !

Dans ce second volet, Beth Fantaskey nous emmène en Roumanie. Quelques mois ont passé depuis le mariage de Lucius et Jessica, et cette dernière tente d’apprivoiser tant bien que mal son rôle de princesse. Lucius la soutient avec force et humour, mais la princesse renvoie une image de faiblesse aux Aïeux. Mais les choses deviennent encore pire lorsque l’un des Aïeux est retrouvé mort, et que son sang est décelé sur le pieu de Lucius. Secondée par sa meilleure amie Mindy et le cousin de Lucius Raniero, Jessica va devoir s’affirmer à la tête du royaume et enquêter pour sauver son mari.

Après lecture, je peux vous dire que je n’ai pas été déçue, j’ai même passé un très bon moment ! En ce qui concerne l’histoire, elle est plus soutenue que celle du précédent roman, plus cohérente. Il n’y a pas de revirement brutal ou invraisemblable. En revanche, il faut bien avouer que l’on voit les « ficelles », que les éléments clés de l’intrigue sont aisément prévisibles.

Mais finalement, ce n’est pas cela l’important. Ce qui compte, c’est le plaisir pris lors de la lecture. Il est dû en grande partie à l’humour de Lucius, que j’avais beaucoup aimé dans le livre précédent, et que l’on retrouve ici dans les mails qu’il échange avec son cousin Raniero, ou dans ses dialogues avec Jessica. Le personnage de Mindy apporte également son lot de fraîcheur et de situations cocasses, elle est vraiment attachante.

Quant à Jessica, elle reste un personnage très attachant. Elle avait fait un grand pas en avant pour devenir une femme dans le roman précédent, pour s’affirmer. Mais elle comprend que le chemin est encore long avant qu’elle ne devienne un vampire accompli. J’aime ce personnage car elle montre que la confiance en soi est quelque chose de délicat, mais qui n’est pas inatteignable.

Du côté des hommes vampires, nous sommes gâtées : nous retrouvons Lucius, toujours aussi délicieux et protecteur, même s’il est en retrait durant une grande partie de l’intrigue. Et nous faisons connaissance avec son cousin Raniero, tout aussi séduisant et à la personnalité complexe (sans oublier un petit accent italien qui ne gâche rien^^). Au final, seuls les « méchants » de l’histoire se montrent un peu décevants.

Enfin, au-delà du côté « léger » de ce roman, de sa fraîcheur, il y a également de la tension dans ce livre. Nous sommes bien conscients que Jessica évolue dans un monde dangereux, et que de nombreux dangers pèsent sur le couple royal. Beth Fantaskey fait des vampires des créatures qui ont une violence et une soif de pouvoir ancrées en eux, loin de l’image lisse de certaines autres histoires. Bref, j’ai aimé l’atmosphère de ce palais roumain où l’on ne peut faire confiance à (presque) personne.

J’ai donc passé un moment délicieux, et mon seul regret est que la fin de l’histoire n’ait rien de bien surprenant. Je remercie donc Lizi d’avoir organisé cette Lecture Commune, et vous invite à lire ce roman, ainsi que l’avis de mes camarades :


Note : 4,5/5

Stellabloggeuse
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« De tous les recoins lugubres du château Vladescu, la salle faisant office de tribunal était décidément le pire. Comme toutes les pièces situées en étage, elle était pourvue d’une cheminée où brulait un feu d’enfer. L’ombre sinistre des flammes dansait sur les murs sombres et accentuait son atmosphère austère. Les bancs disposés en demi-cercle étaient réservés aux témoins, les dalles usées marquaient l’emplacement où se trouvait l’accusé et je me trouvais installée à la grande table, à côté de Lucius, raide sur une chaise inconfortable.
J’aurais volontiers intenté un procès aux fabricants de jouets (Mon petit poney, notamment) qui font croire aux enfants que les châteaux ont des murs rose bonbon, des arcs-en-ciel sur le toit et des meubles en forme de gâteaux… »

mercredi 7 mars 2012

Paris Inch’Allah !, de Kamel Hajaji : une volonté de fer à la poursuite d’un rêve

[Sarbacane, mars 2012]

Me voici avec le dernier né de la collection eXprim’ (éditions Sarbacane) ! En effet, aujourd’hui 7 mars sortent en librairie Paris Inch’Allah de Kamel Hajaji, ainsi que l’Enfant nucléaire de Daph Nobody (que je chroniquerai ultérieurement).

Dans son second roman paru dans la collection (après « Fuck you New York »), Kamel Hajaji met en scène Mohamed, d’abord petit garçon des quartiers pauvres de Tunis. Il vit seul avec sa mère qui l’élève durement, allant jusqu’à le battre et par le mettre à la rue un beau matin, afin de l’endurcir pour réussir dans la vie. Et Mohamed lui en fait la promesse. Un jour, c’est décidé, il reviendra voir sa mère, auréolé de réussite, il lui prouvera qu’il est capable de s’en sortir. Pour survivre, Mohamed suit son instinct et fait preuve d’une volonté immense. D’abord cireur de chaussure, puis domestique, il a un rêve en ligne de mire : Paris, pour accomplir enfin le rêve de son père.

J’ai beaucoup aimé ce roman, et pourtant, ce n’est jamais facile d’enchaîner après un coup de cœur (Hunger Games m’ayant fait succomber la semaine dernière). Mais je me suis facilement attachée à Mohamed, ce petit garçon qui n’a été épargné ni par la vie ni par sa mère.

Comme le souhaitait cette dernière, il devient un jeune homme de plus en plus dur, à mesure que croissent son instinct et survie et sa volonté de réussite. Sans jamais oublier ses valeurs, il en vient à leur faire des entorses, à se montrer pragmatique. Mohamed aurait pu oublier qui il était en chemin, mais il n’en est rien : il reste ce petit garçon voulant à tout prix plaire à sa mère, mériter son amour. En cela, c’est un personnage attachant. En revanche, ce qui peut parfois faire grincer des dents, c’est son mépris des autres pauvres, de ceux qui sont plus faibles que lui. Mais nous comprenons peu à peu que derrière ce cynisme se cache une peur, celle de finir comme eux.

Du côté de l’histoire, j’ai bien aimé l’aspect « parcours », « roman initiatique » de cette histoire. On suit en effet Mohamed au fil de ses pérégrinations à Tunis et ailleurs, en découvrant par petits morceaux cette ville rongée par la pauvreté, où les immeubles délabrés et la misère se trouvent à quelques maisons des somptueuses villas. Mohamed ne croit pas que les politiques puissent changer quelque chose à sa situation, ce ne sont pour lui que des corrompus, et il préfère ne compter que sur lui seul.

Quant au style d’écriture, il est direct et efficace, il amène le lecteur à tourner les pages, rapidement, à quérir la suite de l’histoire. L’auteur réussit à nous faire entrer dans la tête de Mohamed et à nous faire partager son rêve. Je n’ai qu’un regret, c’est que l’histoire se passe un peu vite, on passe rapidement sur certains évènements, on saute rapidement de l’un à l’autre. On voudrait parfois en savoir un peu plus.

Néanmoins, c’est un bon moment de lecture à passer, et si vous voulez découvrir ce titre, vous le trouverez dès aujourd’hui dans toutes les bonnes librairies !

Note : 3,5/5 

Stellabloggeuse
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 « Ici. Au cœur de ce quartier pauvre de Tunis. Où je vis. Au cœur de ces maisons pas finies en briques beiges, écorchées de gris. Au cœur de ces toits traversés de pics de fer qui attendent d’improbables constructions du premier étage. Au cœur de ces fenêtres à vieilles persiennes brunes et de ces portes rondelettes cabossées de mosaïque noire. Où je vis. Au cœur de ces palmiers immortels plantés dans le sol divaguant, pimenté de gravillons et de racines peintes à la chaux. Au cœur de cette médina bercée par le souk aux devantures en toile décorées de teintes vives qui se superposent comme un arc en ciel. Au cœur de ses rues ensablées qui se croisent ainsi que dans un labyrinthe…où je vis. Moi, Mohamed. L’enfant de la maison la plus mal fichue des alentours. Celle du rez-de-chaussée, là où la lumière passe mal. A l’ombre de la vie. »